Le Palais Debbane n’a pas été choisi au hasard par la banque BEMO, mais pour l’histoire de sa résilience. Pour le récit de sa destruction et de sa sublimation, le même que contient aujourd’hui les œuvres qu’il abrite. Cinquante-neuf en tout, de trente-cinq artistes différents. Toutes défigurées. Disposées entre les pièces dans une scénographie signée Jean Louis Mainguy, habillées de poèmes de quinze écrivains libanais et de musique contemporaine ou de première génération. Le palais recevra pendant un mois ces oeuvres éventrées par la double explosion du 4 août. « Les oeuvres ne sont pas restaurées, mais soignées, elles ont pour objectif d’accompagner et de transformer les failles pour créer des passerelles reliant le passé et l’avenir, et nous avons envisagé ce soin à travers la littérature, la musique et la lumière » dénote le commissaire.
Trois types d’œuvres reposent au premier étage du palais : certaines inspirées par la catastrophe, d’autres abîmées, non restaurées mais rehaussées par leur mises en relief, d’autres encore, traversées d’une nouvelle touche artistique : des fils de coutures comme des points de sutures, à l’insertion de miroirs et de points lumineux dans les antres, chaque détail appelle le public à l’analyse de son message subliminal. Dans cet espace de silence et de méditation une brume cuivrée rode sempiternellement, rappelant 18h09, ce moment où, traversées d’une onde de choc, les œuvres se préparent à renaître différemment.
Mais ce projet d’exposition n’est qu’une halte. Première exposition itinérante de cette envergure au Liban, l’ « Art blessé » n’est qu’au début du long voyage qu’elle entreprend. Elle continuera de se déplacer, comme le peuple qu’elle dépeint, mais aussi pour aller à la rencontre du monde, et les inviter à poser le regard sur cette terre de richesse qui défie la binarité du bien et du mal. « Notre ambition est de sublimer l’art par les conséquences du mal » affirme Mr. Obegi, président-directeur de la banque Bemo. Et de continuer « l’Art Blessé, c’est un art qui prend la blessure en tant que telle, pour aller bien au-delà de ce qu’elle a été ».Un souffle de sagesse, comme un clin d’oeil à cette première œuvre signée Alain Vassoyan, où le Libanais est une figurine d’argile qui recollerait ses membres à l’infini, même si ceux-ci viendraient à s’envoler mille fois.
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