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Le romantisme colonial - Épisode 5

05/10/2023|Sébastien Hubier et Léa Samara

Sous l’influence de la France révolutionnaire puis napoléonienne, l’Europe connaît au XIX e siècle son heure de gloire et éprouve soudain les effets politiques et économiques des bouleversements idéologiques des Lumières. Mais l’époque romantique est aussi, paradoxalement, le moment où s’expriment avec le plus d’audace les sentiments nationaux. Sur ces bases les techniques connaissent – surtout en Europe de l’Ouest et aux États-Unis – leurs avancées les plus déterminantes et que commence un développement inégalé de l’industrie et de l’agriculture. La croissance démographique débutée à la fin du XVIII e siècle s’accélère, et la population européenne double en une petite centaine d’années. Industrialisation et urbanisation étant étroitement liées, les populations citadines enflent et se dissocient nettement. Par dessus tout, cette industrialisation favorise l’enrichissement des classes moyennes – cet accroissement des richesses étant en grande partie dû à la colonisation qui hâte la fortune des investisseurs. C’est dans ce contexte d’intenses bouleversements géopolitiques et économiques que se déploient l’amour, le désir et la séduction romantiques.

 

Ceux-ci ne sauraient se réduire à une résurgence tardive du pétrarquisme dont il est vrai, cependant, qu’on entend encore des échos chez des poètes comme Hugo, Byron et, plus tard, Rilke. Certes, on ne peut pas réduire le romantisme au sentimentalisme. Il n’empêche que de la Russie à la France, et de la France à l’Angleterre règne une sensibilité exaspérée faite d’émotivité, de pathétique et de larmoiement, d’une foi optimiste aussi dans la vertu triomphante, rédemptrice, et finalement récompensée.

 

Pourtant, sous l’influence des guerres coloniales, le romantisme emprunte également au Baroque la violence du désir, décrivant systématiquement les rapports amoureux en termes de brutalité. Le Romantique ne dédaigne pas de s’emparer par surprise de celle qu’il convoite “si belle, à demi-vêtue et dans un état d’extrême passion”, qu’elle ne peut opposer “aucune résistance”, écrit Stendhal dans La Chartreuse de Parme. C’est cette même exaltation amoureuse qui motive l’éloge de la prostitution et les louanges que les poètes adressent, avec des accents qui annoncent le décadentisme des années 1890, aux prostituées et aux courtisanes. Ce que l’on retrouvera, justement, au cœur de la poésie de Baudelaire au mitan du siècle. L’amour romantique, excessif et brutal, subvertit la morale et apparie souffrances et jouissances, délices et supplices. Il est lié au malheur, aux passions désespérées, aux crimes abominables, aux meurtres, aux trahisons, aux suicides, à toutes sortes de dévastations bizarres. Il est paradoxalement à la fois dionysiaque et mélancolique, un vague à l’âme morbide, une conscience malheureuse de la solitude, de l’écoulement du temps, de la cruauté d’une Nature déifiée “si belle, à demi-vêtue et dans un état d’extrême passion”.

 

Le romantisme mettant en avant des principes ouvertement individualistes et hédonistes favorise l’émergence d’un nouvel érotisme qui est le produit des conditions socio-économiques que j’ai brièvement rappelées. Les tableaux et lithographies du début du XIXe siècle agrègent ces différents motifs et les associent à la sentimentalité, à la tendresse, à l’intimité alors en vogue. L’amour est conçu comme une mélancolie agrémentée de pessimisme et comme une forme diffuse de nostalgie. C’est dans ce contexte que, comme dans l’univers baudelairien, exotisme et sensualité se trouvent appariés : dès l’époque romantique, l’Occident regarde vers les colonies ; et la volupté romantique, qui aime les bizarreries, s’appuie résolument sur un imaginaire oriental, tropical, torride qui deviendra, avec le temps, dolent, languide, inquiétant. L’érotisme romantique est ainsi également un rêve d’exil, un désir lointain, une promesse de plaisirs inédits.

 

Dès le début du XIXe siècle, en effet, se met en place l’imaginaire du “harem colonial” Certes, les historiens savent qu’en réalité la vogue de l’orientalisme a débuté bien plus tôt, à la Renaissance, à Venise, cette ville qui, entretenant des relations privilégiées avec Damas, Alexandrie, Constantinople, Le Caire et Jérusalem, a permis à de nombreux peintres, de Bellini à Carpaccio, de se nourrir de la matière et des techniques de cet Orient méditerranéen qui enflammait déjà les anciens Romains. Cependant, c’est surtout à la fin du XVIIe siècle, lorsque les rigueurs classiques ont commencé à lasser les lecteurs, que l’orientalisme s’est développé en Europe, s’y teintant d’un érotisme qui tendait à découpler sexualité et sentiment. En 1704, Antoine Galland livre sa célèbre traduction des Mille et Une Nuits consacrant la mode des fictions orientales qui mêlent magie et sensualité, impertinence et fantaisie. Les fêtes, les spectacles et même les arts décoratifs témoignent de cet engouement traversant toutes les Lumières. Watteau et Boucher s’adonnent à des chinoiseries, Rameau compose un opéra-ballet intitulé Les Indes galantes et le conte oriental, genre inventé au XVIIIe siècle, perdure dans le domaine littéraire jusqu’au seuil du XXe . 

 

L’imaginaire colonial qui, en matière de séduction, concerne à la fois les phobies et les fantaisies occidentales sur l’Orient est loin d’être un phénomène strictement français. William Beckford, passionné par l’Inde, le Japon, la Chine et le Moyen-Orient, est un écrivain majeur en Grande-Bretagne dont les lecteurs reçoivent avec enthousiasme l’Histoire du calife Vathek. Ce roman a permis de renouveler durablement le roman fantastique et a ensuite ensorcelé Flaubert, Tourgueniev et Mallarmé qui se réjouissaient de l’évocation de ces “troupes de jeunes filles belles comme les Hourisb, et prévenantes comme elles, qui ne se lassaient jamais de bien recevoir tous ceux que le Calife voulait admettre en leur compagnie” dans Vathek et ses épisodes. Cet imaginaire colonial conduit les artistes à pratiquer un nouveau type de représentations du nu érotique qui concernent la figuration aussi bien de harems fantasmatiques que celle des beautés un peu tristes du Levant. Ces fantasmes – qui coïncident d’ailleurs avec le développement de l’ethnologie européenne – accompagnent l’apogée du colonialisme qui, de ce fait, s’en trouve légitimé et magnifié. Colonies, comptoirs, protectorats, de ce point de vue, ne sont rien d’autre qu’une construction culturelle qui, servant des intérêts économiques, induit une érotisation de la distinction entre civilisés et barbares ; étant entendu que cette érotisation se fonde toujours sur un rapport de domination.
 

Sultane, Van Loo, 1747 

 

De fait, à mesure qu’elle s'intensifie, la colonisation induit une nouvelle image des polissonneries d’un Orient qui, présenté dans sa radicale altérité, accorde une vaste place à la brutalité et à une forme hypersexualisée d’animalité. La tentation de l’Orient colonisé ne se réduit donc pas à l’attirance qu’exercent sur les aventuriers ces contrées lointaines à conquérir et à exploiter. Comme le Hammam et le Bain maure (1870) de Jean-Léon Gérôme, il charme aussi, par sa promesse de plaisirs charnels inconnus, une triste Europe, contrainte par une moralité bourgeoise toujours plus tatillonne.
 

Bain maure, Jean-Léon Gérôme, (1870)

 

De ce fait, les colonies semblent autant de paradis licencieux, de gigantesques sérails, comme si, “réprimant jour après jour leurs désirs, les Européens se défoulaient dans des colonies imaginaires”, comme l’écrit Régine Goutalier. Et c’est ainsi que dans les arts savants comme dans la culture de masse (cartes postales) s’élabore un imaginaire colonial qui détermine de nouvelles figures du libertin et de la séductrice. En effet, de quelque manière qu’elles soient figurées, les Orientales sont perçues, imaginées, comme naturellement lascives. Reprenant les stéréotypes alors attachés à la sexualité antique – et dont l’ardente Cléopâtre reste un archétype majeur, chaque indigène est vue comme une débauchée, une séductrice dépravée. 

 

Aussi, comme dans le cas de la réinterprétation de l’Antiquité chez Pierre Louÿs, l’érotisation des colonies correspond-elle d’abord à un double mouvement de projection et d’introjection : en imaginant les indigènes de leurs colonies comme sensuelles, dissolues, perverses, les Occidentaux arrêtent, en réalité, un jugement sur eux-mêmes. En somme, l’Orient qui, à l’époque romantique, connaît une acception très large et désigne à la fois le Maghreb, l’Égypte, la Mer Rouge, la Terre Sainte, la Syrie, la Turquie, L’Inde, la Chine, le Japon, l’Asie du Sud-Est et la Russie, est une topique fantasmatique, qui correspond à la rencontre entre un imaginaire collectif et une réalité économique. 

 

Encore une fois, la morale romantique en matière de sexe se révèle hybride et conflictuelle. En effet, s’il permet l’émergence d’une sensualité neuve, le romantisme est également fait d’hostilité à cette mollesse que l’Orient représente à ses yeux de manière emblématique. En cela, il correspond aussi, sans surprise, à une répression, à un refoulement de la sexualité. L’ambiguïté romantique tient au fait que le XIXe siècle assiste à la fois au sacre de la pudeur et à une véritable obsession pour les perversions, ce dont rendent compte les lithographies, puis les photographies. 

 

Dans la seconde moitié du siècle, le nu photographique exerce, de fait, sur les mœurs comme sur les arts, une influence profonde et durable. S’il fait d’abord allégeance aux Beaux-Arts – notamment aux règles du dessin académique –, il bouleverse rapidement la peinture et la sculpture elles-mêmes (Delacroix, Moreau, Rodin) et promeut de nouveaux motifs qui, progressivement, vont devenir prégnants dans le cadre de la séduction : le masque, le miroir, le fragment corporel, la chevelure dans laquelle, à l’instar de Baudelaire, le dandy “respire l’odeur du tabac mêlé à l’opium et au sucre”. Dans les arts ainsi, comme dans la vie, le XIXe siècle est celui des contradictions : il est le règne du Bourgeois grave et décent, l’Âge d’or de la Prostituée adroite et cynique. Obnubilé par la pureté de l’Occident, il est aussi fasciné par les beautés coloniales – odalisque, houri ou almée.

Odalisque, Delacroix, 1825 


 

Focus Léa: Le harem sub-fantasmé dans la peinture orientaliste 

À partir de 1704, après la traduction des Mille et Une Nuits par Antoine Galland, l’image sensuelle de la femme du harem inspire les peintres occidentaux. Pour les artistes des XVIIIe et XIXe siècles, le glissement du nu mythologique au nu oriental est aisé; il éloigne de la routine académique et autorise les accessoires exotiques plaisants à l’œil. Inspiré par le mystère entourant le harem ottoman, mystère que les voyageurs de toutes les époques se sont empressés de nourrir, ce fantasme de femme à la fois fatale et soumise a beaucoup fait pour le succès de ce genre de peinture. C’est tout à fait un symptôme de l’orientalisme saidien idéalisé, fondé sur la perception occidentale de la région par des voyageurs. En effet, nombre de peintres ne foulent jamais la terre d’Orient et ne voyagent qu’autour de leur chevalet en s’inspirant de récits de voyages faits par d’autres. C’est le cas, entre autres, d’Antoine Jean Gros, de Jean Auguste Dominique Ingres, de Francisco Hayez ou de John Martin. Ces peintures présentaient souvent un groupe de femmes orientales, souvent dénudées ou partiellement vêtues, dans des intérieurs luxueux et sensuels.
 

Femmes d’Alger dans leur appartement, peint par Eugène Delacroix en 1833 est un exemple éloquent. Dans l’espace clos et confiné d’un harem algérois, trois femmes sont assises sur de luxueux tapis orientaux. Le visage des femmes exprime la voluptueuse langueur attribuée aux odalisques orientales. Elles sont vêtues, à la mode algéroise, de chemises en étoffe fine, blanche, unie, fleurie ou jouant sur des textures mates et brillantes, par-dessus des pantalons bouffants, des sarouels, qui laissent voir leurs mollets nus. La femme de gauche s’appuie négligemment sur des coussins empilés, tandis que ses deux compagnes semblent engagées dans une conversation douce et feutrée. À droite, une servante noire sort du champ en tournant la tête vers ses maîtresses. Les murs sont revêtus de carreaux de faïence ornés de délicats motifs. Dans la niche qui surplombe un placard aux portes entrouvertes apparaît de la vaisselle précieuse. À gauche de cette niche est accroché un miroir richement encadré. Sur le sol gisent trois babouches abandonnées. La femme aux longs cheveux assise à droite tient dans la main gauche le long tuyau d’un narguilé. La pièce est dépourvue de meubles mais il en émane une impression de luxe et d’exotisme. 

Femmes d’Alger dans leur appartement, Eugène Delacroix, 1833

Les peintres orientalistes offrent l’évasion dont elle a besoin à la grande bourgeoisie industrielle et financière, la possibilité de rêver devant des images de minarets, de kasbahs blanches, de souks colorés, de déserts, d’oasis, mais aussi de sultanes recluses avec leurs esclaves dans l’intimité raffinée et luxueuse de ces harems. Pour la grande bourgeoisie, l’orientalisme, c’est l’excitant mystère des nudités suggérées par des soieries légères et diaphanes, l’apparente liberté de mœurs de ces femmes cloîtrées dont les attitudes et les comportements contrastent fortement avec la pruderie occidentale. Le spectacle de ces images de harems donne la sensation quelque peu perverse de pénétrer par effraction dans un univers interdit où se mêlent intimement exotisme et érotisme; dimension voyeuriste incontestablement prégnante dans la perception du harem.

 

En effet, le fantasme du harem vient aussi du fait qu’il représente une subversion à la norme, aux mœurs occidentales. Etymologiquement, le harem vient du mot arabe harâm qui signifie ce qui est interdit par la loi coranique (shar'ia) mais aussi ce qui est sacré et, en tant que tel, doit être protégé. Par extension, le harem fait référence à la partie du palais ou de la maison "réservée" aux femmes (épouses, concubines, domestiques) et aux enfants en bas âge des deux sexes. Comme l'explique très bien Fatima Mernissi, le harem est donc une "frontière" entre le féminin et le masculin, le public (tajahûr) et le privé (sîtr), le halâl et le harâm. 

 

Enfin, avec la représentation orientaliste des femmes, on assiste à une transgression des normes picturales de l’époque. Les mœurs y sont différentes et certaines pratiques tolérées (telles que l'esclavage, la polygamie, le bain public, etc.). 

La Grande Odalisque, Ingres, 1814 

Cette tolérance entraîne en Europe un phénomène de fascination-répulsion pour le harem, lieu de despotisme sexuel. Ainsi, lorsque Le Déjeuner sur l’herbe (d’abord intitulé Le Bain, puisqu’il contient aussi une scène de ce type) de Manet scandalise, Le Bain turc d’Ingres, réalisé la même année, est mieux accepté.

Odalisque, Francesco Ayets, 1839

Si l’on peut penser que l’exotisme et la féminité exclusive du second sont moins provocateurs que le réalisme géographique et la mixité du premier, on peut aussi suggérer que les corps nus, finalement bien occidentaux, d’Ingres et de sa Grande Odalisque, tout en ayant une certaine dimension érotique, sont ici associés à une pratique saine et propre. En effet, dans La Petite Baigneuse – Intérieur de harem et Le Bain turc, l’espace du bain est comme aseptisé (il est immaculé, et l’eau totalement pure).

Portrait de femme orientale, Salmeron, 1893 

Artificiel, il ne lie pas le corps à la nature (et par là à une certaine énergie animale et pulsionnelle mal définie et illimitée), mais l’enferme dans un lieu clos et protégé. Un espace où les soins précis et élaborés qui lui sont prodigués déculpabilisent la nudité et le plaisir du bain. 

 

Ces représentations du harem sub-fantasmé ont contribué à perpétuer des stéréotypes et des fantasmes sur les femmes orientales, renforçant ainsi les idées préconçues et les notions de l'altérité sexuelle et culturelle.

 

Lexique

- Pétrarquisme: Les poètes pétrarquistes cherchaient à imiter la finesse, la mélodie et la musicalité des sonnets de Pétrarque, poète italien du XVIe siècle. Il se manifeste principalement dans la poésie amoureuse, avec l'utilisation de la langue italienne et l'expression de sentiments passionnés et courtois envers une figure féminine idéalisée. 

- Décadentisme: Mouvement artistique et littéraire qui s'est développé principalement en Europe, en réaction à l'idéalisme et à l'optimisme du siècle précédent. Il s'agit d'un mouvement marqué par une esthétique de la décadence, de la sensualité, de la folie, de la dépravation, ou même de la mort. Parmi les figures emblématiques du décadentisme des années 1890, on peut citer le poète français Charles Baudelaire avec son recueil Les Fleurs du Mal.

- Dyonisaque: Fait référence à la philosophie et à l'esthétique développées par Friedrich Nietzsche dans son ouvrage La Naissance de la tragédie. Terme dérivé du nom du dieu grec Dionysos, associé au vin, à l'ivresse, à l'excès et à l'extase. Selon Nietzsche, il existe deux forces fondamentales dans la culture et dans l'art : l'apollinien et le dionysiaque. L'apollinien représente l'ordre, la mesure, la rationalité et l'harmonie, tandis que le dionysiaque incarne l'excès, la passion, l'irrationalité et la démesure. 

- Hédoniste: Les hédonistes sont des philosophes qui prônent la recherche du plaisir comme le but ultime de la vie, le critère principal du bien-être et de la moralité, et défendent qu'il doit être poursuivi et maximisé. 

- Chinoiserie: Objets, motifs ou éléments stylistiques inspirés de l'art et de la culture chinoise, mais souvent interprétés de manière fantaisiste ou stéréotypée. Les chinoiseries étaient particulièrement populaires en Europe aux XVIIe et XVIIIe siècles, où elles étaient intégrées dans l'architecture, la décoration intérieure, les textiles, la porcelaine et d'autres formes d'art. 

 

Pour aller plus loin
- Stendhal, La Chartreuse de Parme (1839) II-25, Paris, Le Livre de Poche, 1962
- William Beckford, Vathek et ses épisodes, Paris, Corti, coll. « Domaine Romantique », 2003
- Yvonne Knibiehler & Régine Goutalier, La Femme aux temps des colonies, Paris, Stock, 1985 

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