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Fairouz Oudjida chante « Li Beirut » : c’est comme un moment de recueillement

01/12/2021|Gisèle Kayata Eid, Montréal

Elle chante comme elle parle, intensément, passionnément. L’interviewer n’est pas chose aisée, car ses paroles fougueuses à l’instar de sa voix vous emportent toujours plus loin, toujours plus haut. Une symphonie d’émotions et de sentiments. Une cascade joyeuse. Joie de chanter, d’être au Québec, d’appartenir à un pays (l’Algérie) qu’elle porte en elle, de communiquer son bonheur de partager avec son public… Notamment quand elle interprète « Li Beyrouth » de Feyrouz. 

 

Son prénom n’est pas un hasard, probablement un signe du destin; car sa grand-mère, grande fan de notre diva nationale, a voulu lui donner ce prénom, sans savoir que sa petite fille serait un jour surnommée « La Diva du désert ». Ce désert aride où elle a vécu avant de s’envoler pour suivre des études de musique au Conservatoire d’Alger, puis en Europe, plus exactement à Milan, où elle a parfait son art, avant de s’installer à Montréal où je l’ai rencontrée, à la suite d’un concert à guichets fermés dans la prestigieuse Cinquième salle de la Place des arts, à l’occasion du Festival du monde arabe.   

 

Artiste immigrante accomplie Fairouz Oudjida, lors de précédents concerts, avait déjà fait vibrer l’exigent public de l’Amérique du Nord avec le coffre de sa voix, sa présence flamboyante mais surtout par l’émotion que cette cantatrice répand dans les salles où elle se reproduit. 

 

Écouter la soprano chanter est vraiment un moment de grâce.  Son répertoire musical composé de grands classiques occidentaux, arabes et algériens est à lui seul un voyage d’harmonies et de tonalités… Que serait-ce quand elle chante « Li Beyrouth » de Feyrouz ? 

 

A cette voix fabuleuse, est venu s’ajouter, lors de notre entretien, un radieux sourire et une allégresse profonde, communicative, généreuse. 

 

Pourquoi avoir voulu reprendre cette chanson spécialement ? Une réponse à la mesure de la sensibilité de la jeune femme. « Parce que le jour de l’explosion du 4 août, quand j’ai entendu la nouvelle j’étais en studio en train d’enregistrer mon premier album. Profondément bouleversée, j’ai senti qu’il fallait que je partage ma peine avec les Libanais avec qui j’ai une relation profonde. Non seulement j’ai beaucoup d’amis Libanais, mais l’ouverture de ce pays, son multiculturalisme, son rayonnement, l’Histoire tourmentée de ce peuple m’a toujours laissée connectée étroitement à tout ce qui lui arrivait. »

 

C’est avec cette sensibilité exacerbée que la soliste du chœur symphonique d’Alger a traversé les continents, munie de sa voix envoûtante. Celle qui a su garder en elle vivace ses origines qu’elle interprète notamment dans des chants traditionnels des terroirs algériens, nourrit son amour pour la musique avec ses tripes. « La tragédie du 4 août m’a bouleversée et j’ai voulu rendre hommage à cette capitale, en réinterprétant cette chanson de Feyrouz qui déjà m’avait beaucoup impressionnée quand je l’avais entendue pour la première fois »  (ndrl Feyrouz avait donné un concert à Beyrouth, le 17 septembre 1994, pour signer la réconciliation nationale et elle y avait interprété la chanson écrite en 1983 par le poète Jospeh Harb, sur la musique du deuxième mouvement du « Concerto d’Aranjuez », du compositeur Joaquín Rodrigo.) Je n’avais jamais chanté «Li Beirut », mais cette chanson m’a toujours habitée. Je retiens toujours mes larmes vers la fin. Les paroles sont si touchantes, l’interprétation si poignante, la musique si belle ».

 

Et c’est tout à fait dans la personnalité de cette grande dame, demeurée simple et reconnaissante (« Je dois beaucoup à ma professeur russe Tatiana (Sergueeva Saouli) à Alger que le destin a mise sur ma route »), tout à la fois mystique et professionnelle (une pro de l’opéra qui a interprété Mozart, Rossini, Donizetti, Tchaïkovski, Bizet et Massenet). Sa plus grande force est probablement ce désir de transmettre des messages d’amour. « Depuis que je suis petite, j’étais contente de faire plaisir aux autres en chantant pour eux. Aujourd’hui, sur scène, c’est toujours le même sentiment. Mes collaborateurs, mes musiciens ne me reconnaissent plus. Calme dans la vie de tous les jours, je suis animée d’une puissance extraordinaire quand je chante. Je suis heureuse de chanter et je suis heureuse de toucher le cœur des gens. »

 

Toucher le cœur des Canadiens. Un grand défi qu’a relevé avec brio Fairouz Oudjida lors de sa tournée à l’été 2021 dans plusieurs villes du Québec, pour lancer son nouvel album intitulé « La Diva du désert ». Elle y reprend des chansons connues (dont celle de Riad Taha, « Ya rayeh »), mais aussi méconnues du public, puisées dans ses origines berbères. La presse canadienne atteste : son interprétation de « Li Beirut » (sur une adaptation de Dominic Boulianne) a électrisé les foules.   

 

Est-elle rentrée en contact avec Feyrouz par la suite ? « Ah non ! C’est trop difficile. On ne peut pas l’approcher si facilement. Je serai tellement honorée de rencontrer cette icône ». 

 

Heureux celui qui pourrait lui exaucer son rêve ! Façon comme une autre de lui rendre ce vibrant et talentueux message d’amour que Fairouz Oudjida a adressé à Beyrouth et à tous les Libanais. 

 

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