S’il fallait retenir encore une chose de cette magnifique et majestueuse révolution qui enveloppe tout le pays, c’est ce mépris cinglant qui est l’unique réponse aux revendications criées d’une seule voix. Dans le dictionnaire le mépris est un sentiment par lequel on considère quelqu’un comme indigne d’estime. Et voilà qu’est révélée s’il fallait encore en douter l’incroyable fossé qui sépare le peuple de ses dirigeants. Dirigeants qui pourtant ne sont là que grâce au vote de ce même peuple sur lequel ils crachent aujourd’hui. De facto que représentent encore ces gouvernants si ce n’est eux-mêmes ? Sourds, muets et aveugles, ils ne peuvent se permettre de quitter le pouvoir tant sont grands leurs crimes, tant sont énormes leurs fraudes. Partir c’est devoir rendre des comptes, c’est surtout ne plus exister politiquement et pour longtemps. Cette révolution est aussi celle des chiffres : deux millions de Libanais. 10 452 km2 en ébullition. Dix jours de blocage et de révolte. Des centaines de milliers de drapeaux libanais. En face des hectares de forêts partis en fumée. Des centaines de milliers d’arbres brûlés par l’incurie. Des milliards de dollars disparus dans les comptes. Des dizaines d’années de perdues. Des millions de Libanais exilés de force. Et des kilomètres de torrents boueux de ce mépris dégoûtant. Mais mépriser c’est aussi ignorer le danger. Le danger qui les guette. Le danger qui a fait descendre les foules. Le danger qui a fait hurler les Libanais. Ignorer ces voix c’est s’enfoncer encore plus dans l’abîme dans lequel ils pensaient avoir mis le peuple et dans lequel ils se trouvent eux aujourd’hui.