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Acsauvel, un foyer pour toutes les générations

18/03/2024|Dounia Mansour Abdelnour

Le 20 mars, à l’occasion de la fête des mères, un brunch de levée de fonds au profit d’ACSAUVEL se tiendra à Rabieh dans les locaux de Loris Gourmet. Coup de projecteur sur cette association qui vient en aide aux enfants à besoins spécifiques depuis près de 50 ans. 

 

 

C’est en 1976, il y a presque un demi-siècle, que deux femmes, Yvonne Gemayel et Nabila Farès, décident de se mobiliser pour assister les déplacés de la ville de Damour, tombée aux mains d’éléments armés palestiniens, qui viendront se réfugier au Metn. 

 

Une fois lancées sur le chemin de l’assistance humanitaire, elles constatent l’absence de soutien au problème de la santé mentale. À l’époque, le sujet est épineux car il est tabou. En effet, il est malséant, honteux de révéler une maladie mentale chez un enfant. L’État est dans le déni, la stigmatisation parentale et sociale, est de règle. Les familles cachaient et isolaient l’enfant socialement. Il était, dès lors, très difficile de se soucier des problèmes des EBS (Enfants à besoins spécifiques) et déficients intellectuels. Ces deux vaillantes femmes décident alors de sortir de l’ombre cette question méconnue et si mal vue. C’était la première fois que sur le terrain, l’on se penchait sur un sujet où les besoins sont immenses, les soins et l’éducation onéreux car ils requièrent des experts en disciplines variées. Il faudra attendre 1979 pour que l’association Acsauvel (association civile pour la sauvegarde de l’enfant au Liban) soit reconnue officiellement. 

 

La joie des enfants d’Acsauvel

 

En 1981, ces deux pionnières, femmes d’action résolues, se rendent en Allemagne à leurs propres frais, et vont taper aux portes de Misereor, Association allemande catholique pour le développement, ainsi que WVI (World Vision International) qui assiste les enfants du monde entier. Elles se présentent simplement en tant que deux femmes libanaises ayant besoin de fonds pour la cause des déficients intellectuels. Leur requête est entendue.

 

Ce qui est remarquable alors chez ces pionnières, c’est leur vision précoce d’inclusion sociale des personnes déficientes, une approche futuriste qui tend vers une prise de conscience collective et une valorisation des personnes vulnérables. C’est ainsi qu’aussi loin qu’en 1988, des camps d’été sont organisés pour ces enfants qui étaient encadrés par des volontaires, des enfants issus d’autres écoles, qui viennent assister le personnel spécialisé d’Acsauvel tout en effectuant des stages. Ce séjour visait, d’une part, à les initier à la manière de se conduire avec les enfants différents, d’autre part, à aider les EBS à se réadapter au contact d’enfants venus d’ailleurs. 

 

     Les enfants d’Acsauvel

Après avoir connu plusieurs centres temporaires à Beyrouth puis à Beit Chaar, un terrain à Tamich est mis à disposition d’Acsauvel par l’Ordre des Moines maronitesen 1985. Une fois l’immeuble construit, c’est devenu « un espace voué à être la Cité de l’Enfant », insistait de son vivant, Yvonne Gemayel. Une bonne gestion, un personnel dévoué et qualifié, une comptabilité ficelée et transparente s’avèrent fructueuses. Au fil du temps, le centre de Tamich, prend en charge jusqu’à 129 étudiants, sans frais, malgré les dispendieux soins indispensables et l’encadrement des spécialistes. 

 

En 2017 et 2018, par chance, juste avant la crise de 2019, Acsauvel a pu bénéficier d’un soutien international pour rénover le centre de Tamich qui datait des années quatre-vingt et mener des travaux d’extension de deux étages grâce au soutien financier de Misereor.  

 

Lorsque survient le marasme économique de 2019 dû à la pyramide de Ponzi nationale ourdie par les banques et les politiciens corrompus, les ONG, comme le reste du pays, confrontées à l’inertie et au cynisme des « dirigeants », sont submergées par les difficultés qui s’amoncèlent. La pire crise économico-sociale du Liban, l’usurpation des dépôts bancaires, la chute vertigineuse de la livre libanaise doublée de la pandémie de Covid 19, se répercutent gravement sur l’humanitaire. Jeanine El Meouchi, présidente d’Acsauvel, souligne que les donations internationales s’amenuisent, la priorité des donateurs revient naturellement aux aides d’urgences des réfugiés. Les obstacles sont ardus pour l’équipe d’Acsauvel qui fournit une éducation spécialisée gratuite. En fait, il fallait payer les éducateurs spécialisés et tenter de ramener leur rémunération au niveau antérieur à la crise, explique-t-elle.

 

En outre, la contribution du gouvernement qui s’élevait à 30% des frais, s’est évaporée. La majorité des fonds disponibles provient du réseau d’amis et de parents libanais pour la plupart, ainsi que de l’équipe de levée des fonds de Dana Saadeh, vice-présidente d’Acsauvel, qui s’évertue à trouver des aides et organiser des évènements culturels lucratifs.

 

Cependant, les fonds fondent. Le cœur gros, Acsauvel prend des initiatives restrictives, réduction drastique des dépenses et du personnel, mise en veilleuses des activités. De surcroit, les parents qui sont parties intégrantes de l’éducation des enfants, ne parviennent plus à couvrir les frais de transport. Aujourd’hui, 25 auxiliaires incluant enseignants, éducateurs, gérants d’ateliers, chauffeurs, s’occupent de 65 étudiants, un nombre qui a chuté de moitié en raison de la crise et ses effets néfastes. 

 

Les enfants d’Acsauvel saluant le public au théâtre 

Il est, néanmoins, hors question de se laisser abattre. Jeanine el Meouchi, souligne qu’aujourd’hui, nous reprenons graduellement nos activités comme avant. Psychologues, éducateurs, orthophonistes, psychomotriciens, ergothérapeutes, aident l’enfant à être plus autonome, plus épanoui. Nous reprenons la fête sportive instaurée depuis 2008 ainsi que les pièces de théâtre qui se tenaient déjà en 1999 où enfants et éducateurs répétaient leur rôle avec des professionnels du théâtre comme Rabih Freiha et George Khabbaz. Les enfants jouent devant les parents et les enfants d’autres écoles tout en véhiculant un message libanais. Le théâtre constitue une thérapie bénéfique pour les élèves en exerçant la mémorisation, la diction, la confiance en soi, le contact social. Cette année, une pièce de théâtre est prévue devant les élèves des écoles publiques à Noël.

 

Dana se rappelle, au sortir du théâtre, les parents étaient émus d’assister au spectacle de leurs enfants et affichaient leur joie et leur fierté. La dernière pièce de théâtre portant sur Gibran Khalil Gibran, a été jouée à la NDU (Notre Dame Université). 

 

Les ateliers de travail 

Dana ajoute, l’association organise de Portes Ouvertes en accueillant les élèves d’autres écoles non spécialisées pour venir passer du temps avec les enfants d’Acsauvel et s’initier à comprendre et réfléchir sur les difficultés des EBS. Occasionnellement, des volontaires participent à la cuisine, au maamoul de Pâques, à la surveillance. Des stagiaires des universités USJ, UL, sont venus cette année effectuer leur stage professionnel.

 

Plus récemment, la fondation AL Walid Bin Talal a financé le CIS (centre Interactif et sensoriel) où les enfants d’autres écoles peuvent passer une journée au Centre AI où se mêlent diverses activités, apprentissage, cinéma 3D, jardinage, fabrication de bougies étudiants. Aujourd’hui, des centaines d’élèves de diverses écoles visitent le centre et s’initient à interagir avec des enfants différents. 

 

Les enfants devenus adultes ne sont pas en reste. Acsauvel prévoit de mettre le centre à la disposition des enfants devenus adultes. Une fois leur éducation terminée, ils peuvent choisir de faire partie du CAT (Centre d’aide par le travail), des ateliers protégés où ils développent travail artistique, manuel, autonomie, compétence pratique, exercices de mémoire, mosaïque, poterie, pâtisserie et broderie. Ces activités leur donnent un but et le sentiment d’être utiles et productifs. Les objets réalisés sont mis en vente et contribuent à leur propre éducation. 

 

Le 20 mars, un brunch célébrant la fête des Mères se tiendra à Rabieh

Pour la fête des Mères, les mamans seront présentes au centre et participeront avec leurs enfants aux activités culinaires, jardinage, jeux de compétition familiaux. Par ailleurs, Le 20 mars courant, un brunch ouvert au public sera organisé à Rabieh.

 

Invitation d’enfants au Centre d’activités Sensoriel en avril

Quel avenir se profile pour l’association ? Jeanine souhaite encadrer un plus grand nombre d’enfants et fournir aux adultes un espace où ils pourront se développer et s’épanouir. Nos enfants seront visibles et respectés, et surtout notre objectif est de devenir financièrement indépendants et crédibles. Un objectif de taille à l’horizon pour une équipe dévouée et perspicace qui ne se laisse par prendre de court. Bonne continuation Acsauvel.

Dounia Mansour Abdelnour

 

Pour informations et donations : 

Tel : 961 3 965 066

danasaadeh@gmail.com

 

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