Dans une démarche toujours renouvelée de valorisation du patrimoine musical libanais, Zeina Saleh Kayali publie une biographie de Wadia Sabra (1876-1952), son 7e ouvrage et le 5e de la collection Figures musicales du Liban (éditions Geuthner). A quelques jours de la présentation de cet opus au Salon du livre francophone, l’auteur parle de l’étonnante personnalité du tout premier compositeur libanais.
Qui est Wadia Sabra ?
Un génie ! Et un précurseur sur tellement de plans. Il est le premier Libanais à avoir été se former en France et à avoir appris le langage musical occidental, le fondateur de la première école de musique au Liban qui deviendra le Conservatoire, le premier à composer des opéras sur des livrets en langues arabe et turque, le premier à avoir fondé une revue musicale, le premier à avoir fait construire un piano oriental et le premier à avoir osé affirmer haut et fort que la musique arabe était à l’origine de la musique occidentale !
Il est le compositeur de l’hymne national libanais ?
Oui, en 1927 il gagne le concours organisé pour choisir un hymne national au Grand Liban qui a vu le jour sept ans auparavant. Sa composition sur le poème de Rachid Nakhlé, ‘Koullouna lil watan’, est choisie par un jury composé de musiciens et d’intellectuels français et libanais. Mais avant cela, en 1908, il avait été le compositeur de l’hymne national ottoman. Son catalogue est par ailleurs très riche puisqu’il a à son actif des mélodies, des opéras, des pièces pour piano, pour orchestre, de la musique sacrée etc.
Quelle est la particularité de sa musique ?
Il est le premier à avoir utilisé les outils de la musique occidentale (harmonie, contrepoint, fugue) qu’il maîtrisait parfaitement et à les avoir mis au service de l’âme orientale. En cela, il a ouvert une voie dans laquelle l’ont suivie les compositeurs libanais qui sont venus après lui.
Comment avez-vous obtenu toutes les informations le concernant ?
Grâce à ses neveux, la famille Misk qui gardaient ses archives, ne sachant à qui les confier, et qui ont eu la merveilleuse idée de les déposer au Centre du Patrimoine Musical Libanais (CPML). Ce trésor national inestimable est désormais à la disposition des musiciens qui souhaitent le consulter. Il se compose de partitions, de lettres, de photos, de programmes de concerts et aussi et surtout des textes de ses conférences concernant ses travaux sur la musique arabe. Une mine extraordinaire.
Pourquoi écrivez-vous son prénom ‘Wadia’ et non ‘Wadih’ ?
Parce que lui-même l’orthographiait ainsi, toutes ses archives l’attestent. J’ai donc souhaité respecter sa façon de se présenter.
Pensez-vous que Wadia Sabra soit trop peu connu de nos compatriotes ?
Oui absolument. Il est injustement tombé dans l’oubli alors qu’il a tant apporté au Liban ! Il est temps de lui rendre enfin justice.
Table ronde autour de l’ouvrage le lundi 5 novembre à 17h30 au Salon du livre francophone, avec Dr Walid Moussallem, directeur du conservatoire, Mme Dima Rifaï, traductrice et Mme Carole André-Dessornes, modératrice.
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