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Jamil Molaeb : Jérusalem. Un défi !

09/10/2018|Nelly Helou

A la galerie Janine Rubeiz, l’artiste Jamil Molaeb expose une trentaine de toiles toutes placées sous le thème de Jérusalem ou Al Qods. 

‘‘J’ai souvent peint des villes, Paris, New York, Moscou, le Caire, Mascate, Mexico, le Maroc… mais peindre Al Qods a été pour moi un sujet de défi’’, affirme-t-il d’emblée. ‘‘Un défi de civilisation. Jérusalem est une terre d’accueil de toutes les religions, elle appartient à tout l’univers. Voilà qu’une personne décide de se l’approprier, telle l'attitude du Président américain Donald Trump qui a vendu Jérusalem’’. ‘‘Le combat pour al Qods est dès lors devenu un défi à relever aussi bien pour les cultures et les religions islamiques et chrétiennes du Machrek (le Levant) et pour l’humanité entière. Le patrimoine et l’homme y sont en danger et l’on cherche sournoisement à tout effacer’’. 

Symboles universels 
Par petites touches figuratives serrées les unes aux autres, Molaeb a choisi de représenter tout ce que Jérusalem porte et incarne comme symboles universels. Il souligne : ‘‘J’ai mis dans mes toiles les messages qui nous interpellent tous dans al Qods : les traditions et coutumes, les religions, les valeurs, la philosophie, la beauté, les couleurs, les formes, les êtres humains, les oiseaux, les poissons, les animaux qui se mélangent tous avec la pierre, la terre, les arbres pour donner vie à cette ville sacrée”.

A-t-il visité Jérusalem ? ‘‘Non, je suis de l'âge de la Nakba , (il est né en 1949) donc je ne pouvais pas avoir l'opportunité de m’y rendre. Je souhaiterai un jour pouvoir la visiter. Pour réaliser mes toiles, j’ai consulté des photos et des documentaires sur Jérusalem. J'ai lu des récits d'écrivains importants dont ceux du grec Kazantzakis, et de multiples poèmes dont un très beau du poète Adonis. Mon poème à moi, sont ces toiles que vous avez sous les yeux. Moi je parle à travers ma peinture tel est mon langage depuis, le jour où j'ai tenu en main un crayon. Dans la vie chacun a son langage : il y a des poètes des écrivains, des philosophes, des penseurs, des musiciens. J’espère que mon langage est compréhensible’’. 

Tout travail artistique authentique est un engagement
Dans une succession d'huile sur canevas, une multitude de détails se juxtaposent pour parler de Jérusalem. Le visiteur doit se rapprocher de la toile pour bien observer le moindre détail. Le dôme, l’église, la population, les habitations, les poissons, l’aigle, le cheval, les animaux, les fruits, la musique, la cruche tout ce qui représente la vie mais aussi les souffrances. Tout ce que al Qods incarne aux yeux de l’humanité. L’accent mis sur tel ou tel autre symbole diffère quelque peu d’une toile à l’autre, mais le thème de base demeure. ‘‘Je ne voulais pas me contredire et m'éloigner du réel’’ affirme Moaleb. 

Il joue sur la couleur. Dans quatre toiles quasi identiques, la ville est représentée à différentes heures de la journée : en bleu, en rose, en violet et en blanc. Un bel effet. Ailleurs un certain flou donne l’impression qu’on regarde la toile à travers une moucharabiya. Dans une autre la couleur ocre est dominante. ‘‘C’est celle des pierres dans les villes anciennes’’, explique -t-il. Quant à la toile principale 2m10 sur 1m50 dans le ton brun, qui accueille le visiteur à l’entrée de la galerie, elle résume toute l'exposition. Molaeb y a mis de façon évidente les symboles qui se trouvent dans les autres toiles. Il l’a intitulée the ‘Lighthouse’ comme si elle était éclairée de nuit au néon. 

Dans l’exposition il y a aussi quelques portraits. Une des toiles 1m50 sur 1m30 représente une femme assise les jambes croisées à l’orientale, habillée en blanc avec de grands yeux plein d’éclats de sumérienne ou pharaonique. ‘‘Sa religion est l'humanisme’’ dit le peintre ‘‘et le blanc est la couleur de la lumière, de la joie, de la vie de la pureté, de la spiritualité’’. Une autre toile représente les femmes de Jérusalem et leur famille avec à nouveau un blanc dominant. On s’attarde aussi devant six panneaux en bois de 2m30 sur 38 cm peint au pastel à l’huile et au charbon représentant différents aspects de la ville mais aussi les drames et les souffrances. Tel le corbeau qui mange le poisson, une personne chassée de son foyer, une maison qu’on démolit au tracteur, un homme qu’on frappe, la révolte des habitants… 

En somme il y a un net engagement dans vos toiles ! ‘‘Tout ce qui est beau, tout travail artistique authentique, toute créativité est un engagement’’, répond le peintre.

La toile est la projection dans l’avenir
Evoquant son parcours, Jamil Molaeb rappelle qu’il a étudié l’art dans quatre universités au Liban et à l’étranger et qu’il a enseigné durant 40 ans à l’Université libanaise et à la LAU. ‘‘J'ai beaucoup aimé l'enseignement. Il est une part très importante dans l'activité du peintre, un enrichissement continu. Car on est en permanence en contact avec les jeunes générations qui ont leur vision, leur liberté, leur personnalité’’. A son actif quarante expositions individuelles et d’autres collectives au Liban et à l’étranger. ‘‘Chaque exposition, dit il est pour moi une nouvelle expérience’’. Ces 25 dernières années, ses expositions quasi annuelles se tiennent à la galerie Janine Rubeiz, prise en main par Nadine Begdache depuis 1993, suite au décès de sa mère, la fondatrice. A Bayssour (près de Aley) son village natal où il réside en permanence il a créé un musée. Il y expose ses œuvres et dans une aile spéciale les toiles d’une trentaine de grands peintres libanais. Des soirées musicales sont organisées dans cet antre de l’art. 

Ses prochains projets ? ‘‘Un nouveau sujet. Une nouvelle expérience. J’estime avoir réalisé un bon parcours artistique avec les gouaches, l'acrylique, le dessin sur bois au pastel et au charbon, la sculpture sur bois et sur la pierre. Mais l'important est de progresser continuellement. Sinon la vie serait une punition si on ne goûte pas au plaisir du lendemain, à l’aventure qui s'en vient. La toile est la projection dans l'avenir’’.
 

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