Seule, dans la vitrine 52, au premier étage du Musée national de Beyrouth, une Vénus en bronze attend.

Approchez. Admirez-la. C’est une Vénus anadyomène, c’est-à-dire sortant de l’eau. Debout, la jambe droite fléchie en arrière, la déesse est nue. Ses formes harmonieuses et un léger déhanchement lui donne beaucoup de grâce. Elle lève ses deux bras de part et d’autre de son visage pour retenir ses cheveux dont la coiffure, savamment agencée, descend en deux mèches ondulées qu’elle retient de ses mains. Découverte à Baalbeck, la statuette, d’environ 15cm de hauteur, représente la déesse de l’amour et de la sensualité. D’autres matériaux à part le bronze dans laquelle elle fut coulée à l’époque romaine, la compose.

Approchez. Regardez-la: des incrustations d’argent pour les yeux, du cuivre pour la pointe des seins. De plus, elle porte des boucles d’oreilles et un collier en or orné d’émeraudes.

Dans le silence recueilli du musée, Vénus regrette la cohue des visiteurs, le brouhaha des écoliers qui se pressaient autour d’elle. La solitude pèse. Il n’y a pas si longtemps de cela non plus, elle était admirée à New York, au Metropolitan Museum of Art où elle avait occupé une place de choix au sein de l’exposition The World between Empires: Art and Identity in the Ancient Middle Eastentre mars et juin 2019.

Que de choses ont changé depuis; que de nouveaux termes ont envahi notre vocabulaire quotidien : pandémie, crise sanitaire, confinement, fermeture, visites virtuelles de musées, expositions à découvrir depuis votre canapé. 

Et puis, il y a le 4 août 2020. L’horreur. 

Vénus est secouée, elle penche légèrement, mais tient le coup. 

Tout comme la statuette de Vénus en bronze, nous vacillons dans notre solitude. Nous nous accommodons de nouvelles habitudes, lorsque l’organisation de nos activités a volé en éclats. Dans ce moment de grande précarité, respectons les mesures requises, certes, mais ne succombons pas à l’oubli de notre patrimoine historique, archéologique et muséal.