Après une série de concerts donnés à guichets fermés à Paris, voici que Le Voyageur pose ses bagages au théâtre national de la Criée pour deux représentations organisées par Marseille concerts. Cette « lecture en concert », alternant textes et musiques, conçue et adaptée par Olivier Plaisant, a séduit tous ceux qui ont eu la chance d’y assister.

Le Monde d’hier de Stefan Zweig (1942), est un texte autobiographique puissant et nostalgique. Ces « Souvenirs d’un Européen » content la lente mais sûre montée des totalitarismes et de la violence dans l’Europe de la première partie du 20e siècle, après une période de confortable et douillette quiétude qui, à la fin du 19e siècle, semblait avoir endormi la méfiance des peuples.

Le comédien Stanislas Roquette porte le texte avec un mélange de fragilité et de force, de douceur et de violence, laissant l’auditoire pantois et totalement submergé par l’émotion. L’Ensemble vocal, fondé par Olivier Plaisant et placé sous sa direction ferme et inspirée, impressionne par son homogénéité et sa précision. Il passe avec une égale conviction de l’atmosphère évanescente et éthérée du romantisme de Schubert à l’impitoyable cruauté de l’univers de Kurt Weil. Les chanteurs, transportés par la mise en espace de Stanislas Roquette donnent le meilleur d’eux-mêmes dans un registre où on ne les attendait absolument pas. Pianiste généreuse à l’approche ample et communicative, Florence Chalamet apporte par sa présence, son écoute et son interprétation, un irrésistible relief au chœur.

Spectacle totalement inédit et original, né de l’amour d’Olivier Plaisant pour la musique et la littérature, parions que ce Voyageur a encore de beaux jours devant lui.