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Le pavillon du Liban à la 60e Exposition Internationale d’Art – La Biennale di Venezia présente « Danser avec son mythe »

23/02/2024

Alpha représentant Al-Mortada:"Sur le bout de nos doigts dansent les mots, les pinceaux et les burins, emplissant les lieux et harmonisant les époques".


Une conférence de presse a été organisée au musée national de Beyrouth en présence du ministre du Tourisme Walid Nassar, de l’écrivain, journaliste et membre de la Commission nationale pour l'Unesco, Roni Alpha représentant le ministre de la Culture le Juge Mohammad Wissam Al-Mortada, de personnalités de la scène artistique et culturelle, ainsi que des médias.
Nada Ghandour, Commissaire et Curatrice du Pavillon du Liban a annoncé le thème du pavillon à la 60e Exposition Internationale d’Art- La Biennale di Venezia et présenté les détails du projet.

Placé sous l’égide du ministère de la Culture et organisé par la Lebanese Visual Art Association (LVAA), le Pavillon du Liban à la Biennale Arte 2024 qui se tiendra du 20 avril au 24 novembre 2024, présente une installation multimédia de l’artiste Mounira Al Solh, intitulée «Danser avec son mythe».

Roni Alpha représentant le ministre de la Culture, le Juge Mohammad Wissam Al-Mortada a souligné: « Il est rare d'observer une telle diversité de mediums artistiques converger au service d'une idée ; et pourtant c'est précisément ce qu'a réussi à accomplir Al Solh dans le cadre de sa participation à la Biennale Arte 2024. Ce qui a commencé comme une exposition retraçant l'histoire de Tyr et des Phéniciens s'est transformé en un voyage de lutte pour la libération des femmes, défiant la société patriarcale et ses abus. À bord d'un navire phénicien, il s’agit d'émanciper les femmes, la ville et la patrie, le tout dans un cadre scénographique qui transporte les visiteurs vers les rives azurées de Tyr, leur donnant l'impression d'être sur le point de découvrir le murex ».

Dans son intervention, Nada Ghandour a souligné: « Aujourd'hui, la région connaît une tragédie, mais ce pavillon de 2024 portera le témoignage de la persévérance, de l'espoir et de la vitalité de la scène artistique libanaise. Il contribuera à asseoir sa légitimité sur la scène internationale et confirmera que le Liban est un centre de création artistique important»

 

Le pavillon du Liban invite Mounira Al Solh (Beyrouth, 1978) à ouvrir un passage entre mythe et réalité à l’intérieur de ses murs lors de la 60eExposition Internationale d’Art - La Biennale di Venezia. Sa vaste installation multimédiaDanser avec son mythe,composée de 41 pièces – dessins, peintures, sculptures, broderies, vidéo – se déploie dans les 180 m2qu’occupe le pavillon au sein de l’Arsenal. En revisitant le mythe de l’enlèvement d’Europe, l’artiste met en perspective les aspirations et les défis auxquels sont confrontées les femmes actuellement. Sur la toile, le papier et l’écran, son processus créatif associe le récit allégorique et l’approche documentaire, l’appropriation et le détournement, à travers des représentations aussi réalistes que poétiques, et très contemporaines.

Aux sources du Liban
Tous les peuples reçoivent en héritage des récits fondateurs ou exemplaires, et parmi eux, les Libanais, dont certains mythes remontent au temps de leurs ancêtres les Phéniciens. L’histoire de la Phénicie est peu connue. Le peuple qui a inventé l’alphabet a laissé peu de traces écrites. Néanmoins, des villes telles que Byblos, Beyrouth, Saïda et Tyr témoignent par leurs vestiges d’un passé glorieux. La Phénicie s’inscrit dans l’histoire des grandes puissances qui l’ont dominée par la suite : la Grèce d’Alexandre le Grand, puis l’Empire Romain. De fameux mythes phéniciens tels que l’union d’Adonis, citoyen de Byblos, et de la déesse Aphrodite, la légende d’Hercule et son chien trouvant le murex sur une plage de Tyr, et l’enlèvement d’Europe dans ces mêmes lieux sont entrés de manière plus ou moins littérale dans la mythologie gréco-romaine. C’est aussi à la richesse de ce patrimoine culturel multimillénaire et toujours vivant que rend hommage Mounira Al Solh.

Le mythe et sa réactualisation
Mounira Al Solh a choisi d’utiliser le mythe pour s’exprimer sur le sort imposé aux femmes et sur leur capacité de résilience, à l’exemple de la princesse phénicienne Europe que l’artiste sauve de sa condition.

Au fil des siècles, l’interprétation des mythes a souvent servi la contestation et la subversion : toutes ces dimensions sont présentes dans l’installation. Le mythe a en soi la qualité fondamentale d’être un discours public et universel – ce qui le rend à jamais contemporain et apte à être réapproprié et revisité.

Dans le récit antique, sur une plage de Tyr, Zeus prend la forme d’un taureau blanc pour séduire Europe, la belle princesse phénicienne et, par la ruse, l’emporter sur son dos jusqu’aux rives de la Crète où il s’unit avec elle. Dans son installation, l’artiste met le présent en correspondance avec la légende de façon inattendue ; elle en propose une lecture alternative, voire inversée, qui autorise la distance critique et l’humour. La recherche d’Europe, à laquelle l’artiste nous invite à participer, concourt à l’accomplissement d’un destin féminin délivré des « dieux » – c’est-à-dire assumant, sans les subir, le rôle et la responsabilité des hommes, et désirant une condition paritaire.

Écrit et ordonné par des hommes, le récit antique exprime la volonté de domination et de soumission des femmes. Le voyage d’Europe vers la Crète évoque a priori celui d'un butin de guerre enlevé aux Phéniciens par les Crétois. Au fil des siècles, en particulier dans la peinture occidentale, les représentations évoluent du rapt au consentement. Mais c’est toujours le point de vue des hommes qui s’exprime. Mounira Al Solh, quant à elle, choisit de promouvoir une relation d’égalité entre les sexes, relisant le mythe avec le regard et la réflexion d’une femme d’aujourd’hui, volontaire et libre. Elle déstabilise le rapport de forces entre le dieu dominant et la princesse dominée. La princesse Europe coopère avec Zeus et le manipule; c’est elle qui le porte et l’emporte en marchant sur l’eau, elle qui le fait tournoyer dans l’espace avec ses pieds tel un ballon. Au fil de sa quête, l’artiste pousse à l’extrême la déconstruction des stéréotypes de genre par l’inversion des rôles et des sexes et notamment en transformant le chien d’Hercule en chienne.

L’installation
Danser avec son mythes’organise autour d’un bateau invitant à un voyage symbolique d’émancipation et d’égalité des genres. Sa structure inachevée signale que ce voyage n’a pas complètement abouti. L’installation se déploie dans un parcours structuré par des rapports de forces. Au centre, l’esquif est situé à mi-chemin entre les œuvres picturales et graphiques qui prônent la remise en question des normes de genre et la lutte pour la parité, et les masques incarnant les forces conservatrices de la société. Les objets présents dans l’espace tiennent aussi un rôle dans le film (12 minutes) projeté sur la voile-écran du bateau.
Les dessins de Mounira Al Solh forment la trame d’un motif central développé dans des peintures qui défient l’iconographie traditionnelle. Transposition, détournement, dénaturation constituent les moyens de la stratégie déployée par l’artiste. Diverses figures archétypales de la culture phénicienne ou de la mythologie peuplent, de façon détonante et parfois cocasse, un monde intermédiaire entre l’allégorie et la réalité. La temporalité deDanser avec son mythen’est pas celle de la légende mais celle de l’artiste en dialogue avec le spectateur, ici et maintenant.


La scénographie, conçue par l’architecte Karim Bekdache, sans réaménagement ni cloisonnement de l’espace, permet une immersion totale.  Y concourent la progression vers un horizon infini peint en bleu-gris, couleur de la mer et du ciel de Tyr, ainsi que le long ponton en bois sinueux qui traverse le pavillon de bord en bord et qui fait le lien entre la terre et la mer. La rencontre entre les œuvres et le visiteur se fait au fil de la déambulation.

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