Témoignant de l'esprit de continuité de la ville, le musée Sursock de Beyrouth rouvre bientôt ses portes, et se prépare à s’illuminer de mille feux. Après un long processus de reconstruction, le musée est prêt à accueillir les visiteurs et à leur redonner le goût de l'art, un symbole de la renaissance de la scène culturelle de la capitale après l'explosion dévastatrice du 4 août 2020.
La grande réouverture se tiendra le vendredi 26 mai 2023. Cinq expositions mêlant des expressions artistiques locales, contemporaines et traditionnelles, y seront présentées.
Une nouvelle vision : savourer lentement chaque exposition
Le musée entame un nouveau chapitre sous la houlette de sa nouvelle directrice, Karina El Helou. Connue pour sa passion pour l'art et son dévouement à la préservation du patrimoine culturel, l’artiste-directrice entend apporter une perspective nouvelle à l'institution.
« Je veux prendre mon temps », explique la directrice à l’Agenda Culturel. « Nous avons été profondément blessés par l'explosion. Il est essentiel que nous prenions le temps de guérir et de reconstruire en nous consacrant à l'élaboration d'expositions de la plus haute qualité. »
Pour la directrice, titulaire d'une maîtrise en histoire de l'art de l'université de la Sorbonne à Paris, la clé d'une exposition réussie réside dans une approche délibérée et sans précipitation. Comprendre et apprécier l'art demande du temps, de la patience et des recherches approfondies. L'un de ses principes clés est de « faire les choses lentement », d'accorder à l'art le temps qu'il mérite, mais aussi de sortir de Beyrouth.
Elle œuvre également à l'ouverture aux étudiants et aux jeunes. En collaboration avec l'Université libanaise, l'ALBA et l'USJ, elle travaille à la formation de guides de musée émergents, de manière à accueillir dix stagiaires à la fois.
« Présenter la diversité culturelle du Liban est un défi, étant donné les différentes langues, cultures, régions et diasporas du pays qui regorgent d'artistes. Nous nous efforçons donc d'être plus accessibles et ouverts aux différents publics », explique Karina El Helou.
Dans un monde où tout bouge à un rythme effréné, le musée Sursock cherche à construire un sanctuaire favorisant un sentiment de réflexion et de tranquillité.
Reconstruire, ou lutter afin « de rester »
L'architecture et les œuvres d'art du musée ont été gravement endommagées par la tragédie du 4 août. Depuis, des projets de restauration ont été lancés, marqués par la détermination et la solidarité d’artistes, d’employés et de donateurs, tant au niveau local qu'international – mais aussi de son équipe que la directrice qualifie de « héros ».
« Le musée Sursock est un signe de résistance. Sa reconstruction n'est pas un simple travail muséal classique. Nous sommes ici pour dire qu'au Liban, nous continuons. Nous nous battons pour rester », déclare Karina El Helou à l'Agenda Culturel, décrivant les difficultés rencontrées par l'équipe du musée, déjà traumatisée par l'explosion.
La réouverture de ce monument culturel intervient au moment où le Liban fait face à la pire crise économique et politique de son histoire. L'institution doit par exemple faire appel à des générateurs privés à des prix exorbitants pour maintenir l'éclairage et préserver ses œuvres d'art, une goutte d'eau dans la mer d'instabilité qui touche le pays.
Cet « acte de résistance » démontre ainsi l'esprit indomptable d'une nation qui refuse d'être définie par la tragédie.
La grande réouverture : la guérison ardue d'une nation
« Après l'explosion dévastatrice, le cœur de la scène culturelle libanaise a été profondément touché », explique la directrice.
Dans le monde de l'art, le poids du patrimoine moderne a une signification profonde. Cependant, alors que ceux qui sont liés à ce patrimoine inestimable cherchent un peu de réconfort au-delà des frontières de leur pays, qu'est-ce qui reste, piégé dans les échos obsédants du silence ? Le musée vise donc à faire reconnaitre et revenir les artistes qui insufflent la vie dans ces salles.
Ce 26 mai 2023, le musée Sursock se tient debout, reconnaissant le pouvoir de transformation de l'art dans la guérison ardue d'une nation.
Avec une détermination inébranlable, il place les artistes à l'avant-garde, leurs esprits créatifs allumant une flamme de résilience au milieu des ténèbres. Grâce à ses expositions dynamiques et variées, il murmure des promesses d'espoir et de réconfort à Beyrouth. Car en vérité, la réalité n'est qu'un humble reflet de la grandeur illimitée de l'art et, inversement, l'art lui-même insuffle la vie à l'essence même de la réalité.
ARTICLES SIMILAIRES
« The School of Life » ou le camp d’été transformatif
Nadine Fardon
19/06/2024
Le voyageur
Olivier Ka
10/04/2024
De miel et de lait, une histoire douceur du Liban
Garance Fontenette
09/04/2024
Levanthym, le zaatar haute couture de Sarah Kanj
Noha BAZ
08/04/2024
Iwan Maktabi à la biennale Design Doha
Jasmine Karkafi
06/04/2024
‘A Amal, le feuilleton coup de poing, coup de gueule
Gisèle Kayata Eid
06/04/2024
Rendez-vous pour la première édition du « Beauty and Wellbeing Forum 2024 ». Une nouvelle approche holistique de la santé
04/04/2024
Une approche holistique de la vie
04/04/2024
La Pro Art Academy célèbre la créativité des enfants
Garance Fontenette
29/03/2024
Jérusalem, la ville de tous les désirs
26/03/2024