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Georges Haddad, l’alchimiste de Beyrouth

10/01/2023|Noame Toumiat

Les plus fêtards d’entre vous ont possiblement fait l’expérience du club Ballroom Blitz dans lequel l’entrée est habillée de longs faisceaux de lumière rouge. Ces néons courbés d’un rouge tamisé, éclairent timidement le chemin vers les différents univers sonores du club. 

Georges Haddad est le directeur de production de ces verres aux formes originales. Alchimiste des temps modernes, il jongle entre un savoir-faire artisanal méticuleux et un imaginaire artistique débordant. Crée en 1910 par Georges Claude, les néons se sont popularisés au fil du temps : initialement présents dans l’espace public, éclairant diverses enseignes, ils se sont multipliés et déclinés dans les foyers. Georges Haddad contribue à cette popularisation depuis quelques années à Beyrouth. Travaillant auparavant dans de multiples secteurs tel que le graphisme, le marketing et la vente, il est devenu progressivement amoureux de ce savoir-faire et nous en fait part dans une interview. 

 

Comment avez-vous commencé à travailler le néon ? 

De retour des Émirats Arabes Unis en 2008, j’ai visité l'atelier de néon de mon oncle à Gemmayzé. Chaque samedi, je me rendais chez lui pour le dépanner car à l’époque il lui manquait des secrétaires. Je préparais les factures, les devis, les lettres à des clients. Le son du feu, des machines ainsi que la transformation de la matière ont suscité ma curiosité. Mon oncle m’a demandé de travailler à plein temps et j’ai accepté. J’ai commencé par organiser et informatiser le stock de la société. Progressivement, j’aidais dans le processus de production. Ainsi mon implication et mes responsabilités au sein de l’atelier ont grandi, je participais aux installations également. J’appréciais beaucoup les sorties sur chantier, le contact avec les ouvriers, les architectes et ingénieurs. En 2017, il n’y avait plus de souffleur de verre dans l’atelier. Étant donné que mon oncle vieillissait et était malade, j’ai commencé à travailler le néon tout seul. Après avoir appris les techniques, j’ai réalisé quelques projets pour des clients et empêcher la fermeture définitive de l'atelier.

 

Quel est le processus créatif du néon ? 

Depuis sa création en 1910, son procédé de fabrication n'a guère changé. Fabriquer du néon est une activité industrielle artisanale. Souvent ce sont des projets faits sur mesure à la suite d’une demande de client et une adaptation adéquate de la part du professionnel (adaptation du dessin suivant le diamètre des tubes, choix des transformateurs, longueurs et couleurs des tubes...). C'est la phase de préparation et artistique du procédé. Après consultation avec le client, et son accord en amont, le souffleur de verre suit le dessin imprimé en miroir sur le papier. Ce procédé est complètement manuel et nécessite des années d'expériences. Le néoniste doit savoir adapter son feu selon le type de verre, et selon le diamètre des tubes. Ce qui était au départ un tube en verre droit, se transforme en une figure géométrique, une courbe, une forme organique ou une lettre, sous la force de la chaleur. C'est la phase physique de cette activité. Afin de colorer les néons, des gaz différents sont utilisés : le néon sera toujours rouge mais pour faire du bleu ce sera de l’argon, sinon c’est la poudre à l’intérieur des tubes ou du verre qui font ressortir la couleur. Le travail manuel est présent dans toutes les étapes de production. Il n'y a pas de machine automatisée pour effectuer ce travail, ce qui nécessite une main d'œuvre qualifiée et expérimentée. 

Quelles sont vos inspirations ? 

Le verre étant l’élément principal, il existe une myriade de possibilités et une grande liberté de création. Souvent, mes créations partent de la nécessité de mettre de l'ordre dans ce capharnaüm de chutes de tubes, de plaques de plexiglas, de lattes de bois ou morceaux de métaux. Je recycle le tout en un objet lumineux, portant un sens, et usuel. Cependant, mon intérêt pour l'art et l'histoire de l'art influence mon activité artisanale. C'est en quelque sorte, mon atout face à la concurrence. Aussi la nature, les fleurs, les objets du quotidien peuvent m'inspirer. Ainsi que des grands noms du monde de l'art aussi à l’instar de Lucio Fontana et Claude Lévêque.

 

Où travaillez-vous ? 

Suite à l'explosion du port de Beyrouth, l’atelier situé à Gemmayzé a été détruit. À l'époque, j'utilisais le bureau comme espace d'exposition étant donné sa position stratégique ; la rue principale est très fréquentée. La conjoncture, la révolte, l’explosion et la crise économique ont freiné mon envie de louer un nouveau local. Actuellement, je produis mes néons dans l'atelier d'un ami proche à Bourj Hammoud. J’aimerais faire connaître LE néon auprès des galeristes du Liban.

 

BEIRUT
Création de Georges Haddad après l’explosion du 4 août 2020. Diamètre 115cmBois et tubes de néons.


Avez-vous une certaine clientèle ? 

Les clients comme les commandes sont diversifiées. Cela est pareil pour les types d'installation, extérieurs (enseignes) ou intérieurs (appliques murales, lustres suspendus, lampes flottantes, lumières indirectes, objets insolites...). Il y a des résidences, des banques, des boîtes de nuit, des demandes pour des halls d'immeuble, d'hôtel, des églises, diverses enseignes... Les architectes, les décorateurs, les designers et les artistes sont les principaux clients. 

 

A savoir

Instagram : @boom_neoncraft

 

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