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Danielle Rizkallah, des petit-pois aux cancers du sein

18/10/2021|Emma Moschkowitz

Comment votre parcours et votre personnalité vous ont-ils mené au film engagé ? De quelle nécessité cette envie est-elle née ? 

J’ai travaillé pendant 25 ans pour l’agence de publicité Leo Burnett. J’y suis entrée alors que j’étais encore aux Beaux-Arts à Beyrouth et, petit à petit, j’ai gravi les échelons jusqu’à devenir directrice créative. Cet emploi m’a permis de beaucoup voyager, à travers le Moyen-Orient, l’Europe Centrale, l’Afrique, etc. Je suis une amoureuse du voyage, j’aime rencontrer des gens et les voir réagir. Ces expériences m’ont aussi permis de faire de la photographie, et mes photos racontent les histoires des Hommes qui ont croisé mon chemin. Et puis, le monde de la publicité a changé, beaucoup de politiques, de business ont commencé à interférer dans mon travail, et je n’arrivais plus à honorer les idées créatives que j’avais. J’avais tout dit sur les shampoings, les petits pois, les serviettes hygiéniques, etc. La publicité, la sur-consommation, ça ne me convenait plus. J’ai commencé à écrire de mon côté, à me préparer mentalement à quitter l’entreprise dans laquelle j’avais passé tant d'années pour me consacrer à la réalisation. Il m’était devenu indispensable de lier mon amour pour les Hommes, pour l’image et pour les histoires. Je voulais travailler en faveur de causes humaines, c’était une évidence. Alors j’ai démissionné, je suis partie à New York pour faire une école de cinéma pendant quatre mois, et j’ai eu mon premier projet, à l’occasion du Marathon des Sables. Neuf jours de course en plein désert en autonomie pour soutenir les enfants abusés durant lesquels j’ai photographié, filmé, et organisé la levée de fond pour un ami. Naturellement, les films se sont enchaînés, avec toujours ce besoin de mettre en lumière des causes qui me tiennent à cœur : les femmes battues, les enfants, les malades, etc. 

 

Comment avez-vous orienté votre travail durant la thawra ? Quel rôle avez-vous choisi d'endosser ? 

Moi, j’ai déjà fait quatre thawra. Je suis engagée depuis longtemps en faveur de la cause libanaise. Pour cette dernière thawra, j’étais dans la rue, au premier jour. C’était important pour moi, d’être un nombre, un de ceux qui disent non. J’étais aussi présente sur les réseaux sociaux, mais c’est surtout après le 4 août et pendant les confinements que j’ai activement fait parler mon art. Je n’ai accepté de travailler qu’avec des clients dont les messages étaient portés sur l’humain, comme par exemple, avec Wardé, qui s’est proposé de remplacer les rideaux déchiquetés des maisons touchées par l’explosion. C’est aussi durant cette période qu’est né le projet de prévention contre le cancer du sein. 

 

La campagne “Bread Test” met en scène une boulangerie familière, celle de Oum Ali, et propose une “recette de pain” qui permet en réalité aux femmes de détecter un potentiel cancer du sein. Comment avez-vous appréhendé l'idée de recevoir tous ces prix suite à la réalisation de cette campagne ? 

On ne s’attendait pas à recevoir huit prix. Je suis très contente de ce succès, mais mon neuvième prix, le plus précieux selon moi, c’est que le message soit écouté, que les choses changent réellement, c’est-à-dire que les femmes soient capables de détecter un cancer du sein, avant qu’il ne soit trop tard, grâce à cette vidéo et aux gestes de Oum Ali. 

 

Est-ce que vous pouvez nous parler de vos projets futurs ? Vous prévoyez de rester au Liban ? 

Je me prépare à l’écriture d’un film, une histoire d’amour. J’ai aussi un court-métrage, qui est déjà écrit et que je vais bientôt soumettre à des boîtes de production. Et je travaille avec des clients. Je viens d’écrire un slam en anglais, pour la Semaine pour la Planète qui va se dérouler à Marseille. 
En ce moment, je tourne un documentaire sur les métiers d’art libanais qui met la lumière un patrimoine en danger de disparition, par manque de support gouvernemental, par manque de soutiens financiers. Il y a énormément d’artisans, qui font notre héritage, qui sont en voie de disparition. Le projet nécessite un an et demi de travail et s’inscrit dans l’initiative “The Ready Hand”, qui travaille aussi sur une parution littéraire et un répertoire. 

Concernant le Liban, moi je suis contre le départ. C’est un sublime pays, on ne peut pas le leur laisser, on ne peut pas baisser les bras. Au contraire, il faut hausser les manches et plonger dans le travail. Moi je reste au Liban, j’y suis bien, c’est mon pays. Où veux- tu être de toute façon ? Sans argent à l’étranger ou sans argent chez toi ? C’est ici que ça se passe, c’est ici qu’il faut être, c’est ici que je peux faire la différence. Et puis, la vie est pleine de surprises. On ne sait jamais ce qui va se passer lorsque l’on prend des décisions que l’on pense être les bonnes. Alors, je fais travailler des Libanais, même pour mes clients à l’étranger : toute mon équipe de production est libanaise, je les choisis soigneusement, pour leurs qualifications. 
 


 

 

 

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