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Chronique d’un Parisien à Beyrouth # 3

15/03/2022|Jérôme de Rivoyre

J’écris ces lignes d’un cyber café sur une table qui boite un peu accompagné d’un verre d’Arak pour rafraîchir mon palais. Je suis à l’ombre d’arbres si verts qu’ils paraissent faux. Au loin, on voit les Monts Liban encore un peu enneigés. Je pense à Paris, à Beyrouth et entre les deux mon cœur est à la peine car il va bien falloir un jour choisir entre vivre dans la ville romantique ou celle du Levant.

Nous sommes au mois de mai, il fait beau, pas encore trop chaud. La rue est animée. Peu de piétons mais beaucoup de voitures dont les pneus miaulent sur un asphalte brulant. Une jolie jeune fille à la peau mate, coiffée d’une longue tresse qui descend jusqu’aux reins passe à proximité, me fait un petit signe de la main et se dirige vers moi. Je la connais. Je lui offre un quelque chose à boire. Elle s’appelle Maryam. C’est une réfugiée Syrienne et je m’occupe d’elle en faisant des courses pour sa famille. La misère est partout en ce bas monde mais il ne faut pas croire qu’elle soit plus douce au soleil. C’est curieux comme l’on a envie d’être plus généreux ici qu’ailleurs. C’est comme être au chevet d’une femme que l’on aime. Et cette femme c’est Beyrouth. 

Cette scène pourrait aussi bien se passer à Paris où l’environnement n’y est plus vraiment le même. Les gens y sont pressés, ne se regardent plus et ne font plus attention aux autres. Ici la vie est plus douce et les gens plus accueillants. 
 


Les perspectives citadines ne sont pas les mêmes non plus. Du Louvre, on passe des Champs Élysées à l’Arc de Triomphe pour s’envoler vers les belles tours modernes de La Défense. Ici, depuis les grandes maisons Ottomanes colorées du quartier de Gemmayzeh, on passe par les grattes ciel Beyrouthins pour s’envoler vers la mer Méditerranée.

Paris est la Ville Lumière mais malheureusement on ne s’y voit plus, trop occupé à courir derrière on ne sait plus quoi, ni plus qui d’ailleurs. Par contre, la nuit, Beyrouth est plongée dans l’obscurité mais les gens se voient, s’adressent la parole, se parlent, échangent.

Paris est une fête écrivait Hemingway. Paris est surtout une ravissante femme, toujours élégante et belle comme le jour mais devenue sage comme une image. Saint Germain des Prés est toujours là avec son boulevard, ses cafés du Flore et Des Deux Magots, sa brasserie Lipp où l’on peut y apercevoir encore quelques écrivains, auteurs et acteurs de théâtre ou de cinéma. Mais l’ambiance n’y est plus tout à fait la même. Les intellectuels, les libraires et les vendeurs de journaux à la sauvette ont laissé place au monde du luxe et de l’argent. A Montmartre, les ruelles sont pleines de souvenirs des grands peintres qui y ont vécus. La place du Tertre abrite t’elle peut-être un futur grand nom ? Et les touristes déambulent nonchalamment au milieu des chevalets, des boutiques de tee-shirts et de colifichets. Les appareils de photos crépitent.

Malgré la période difficile, Beyrouth est foisonnante, grouillante, créative et continue de s’amuser. Des boutiques de bijoux, de décoration, des restaurants ouvrent ou réouvrent. On y boit et on y danse jusqu’à point d’heure dans les bars et les boites de nuit emplis de musique. Les Beyrouthins qui aiment faire la fête savent qu’ils vivent sur un volcan. A Paris, il est cinq heures du matin et tout le monde dort pour contredire la célèbre chanson de Jacques Dutronc.

J’aime aussi me promener dans les grands jardins Parisiens où il fait bon flâner. Les Tuileries, le Luxembourg, le parc Monceau sont les rendez-vous des amoureux qui s’enlacent et s’embrassent assis sur les bancs publics, dans les allées ombragées ou allongés sur les pelouses. Les enfants jouent avec leurs bateaux à voile sur les pièces d’eau. Les parents les surveillent d’un œil, trop occupés à bronzer effondrés sur leurs chaises comme des guimauves, pendant que les grands parents traversent lentement les jardins pour rentrer chez eux comme avec un dernier regard.

Mais à Beyrouth j’aime également me baigner dans notre Mare Nostrum où il fait bon se rafraîchir ou bien s’aventurer jusqu’au large. 
A Paris, il y a bien aussi de l’eau mais là point de baignades… On y flâne sur les rives en admirant le Musée d’Orsay, le Louvre et on regarde la Seine comme un miroir où les amoureux déclament Apollinaire,
« Sous le Pont Mirabeau coule la Seine 
Et nos amours faut-il qu’il m’en souvienne
La joie venait après la peine ».

Il m’en aura fallu des journées à déambuler dans ces deux villes, à réfléchir, hésiter, peser le pour et le contre mais je pense être arrivé au bout de ma réflexion.
Ça y est. J’y suis. J’ai fait un choix. J’ai pris ma décision.
Je vais partager ma vie entre Beyrouth et Paris ! 
Pour mon plus grand bonheur !

Inshala !

 

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