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Chantal Thomas élue à l’Académie française

30/01/2021|Gisèle Kayata Eid, Montréal

Je l’ai rencontrée à l’occasion d’un festival littéraire à Montréal, le Metropolis Bleu, et depuis je ne l’ai jamais oubliée. Lumineuse.

Invitée du MET, elle l’a éclairé de sa présence tout à la fois délicate et intense à l’occasion de plusieurs interventions que j’ai eu le bonheur de suivre.

 

J’avais lu son dernier livre « Souvenirs de la marée basse », sorti un an plus tôt, en 2017, aux éditions du Seuil. Une fiction autobiographique que j’ai eu le plaisir de déguster. Un récit soyeux qui raconte avec beaucoup de sensibilité et de sensualité, le grand amour de sa mère pour la mer. Une description suave, toute en finesse, une écriture musicale, ciselée qui anime les souvenirs et les scènes avec volupté et éclat. Splendide, tout simplement. 

 

Celle qui dit écrire ses livres après avoir pris des notes à la main avant de les retranscrire et les travailler sur son ordinateur s’était faite surtout connaître avec ses romans historiques qui lui ont valu le titre d’historienne du 18ème siècle et qui ont été adaptés au cinéma et au théâtre. Citons « Les Adieux à la reine » qui a obtenu en 2002, le prix Femina, porté à l’écran par Benoît Jacquot et « L’échange des princesses » écrit en 2013 et réalisé par Marc Dugain en 2017. 

 

Mais ce n’est pas tout, auteure de récits, d’essais, de romans, cette grande dame à l’élégance subtile partage avec ses personnages (Marie Antoinette, Mme de Staël ou la marquise de Rambouillet et bien d’autres) un féminisme raffiné et cultivé qu’elle a défendu lors d’une discussion au titre sans équivoque : « L’érotisme est-il encore subversif ? Entre le libertinage du 18e siècle et la pornographie banalisée sur le Net, entre la libération sexuelle tous azimuts et les nouveaux codes de la séduction sans harcèlement, où en est l’érotisme ? »

 

Il faut savoir que Chantal Thomas a beaucoup écrit sur le marquis de Sade, objet de sa thèse d’ailleurs, qu’elle raconte avoir découvert dans le dortoir du pensionnat, à l’âge de 17 ans, quand, cachée avec sa lampe de poche, elle le lisait avec délectation, dans une clandestinité totale. Elle a d’ailleurs longuement écrit aussi sur Casanova, le grand séducteur vénitien : “Casanova, un voyage libertin” en 1985.  

 

Interrogée sur le mouvement #MeToo qui, rappelons-le, est devenu viral à travers la planète, en 2017, après le scandale sexuel impliquant le producteur hollywoodien Harvey Weinstein, mouvement qui a libéré la parole de millions de femmes, celle qui a longtemps été passionnée par l’érotisme estime qu’il faut préserver la liberté sexuelle des femmes et leur capacité à dire non et de reconnaître que « Souvenirs de la marée basse » est d’ailleurs une ode à la liberté de la femme où elle raconte l’insoumission de sa mère Jackie et sa passion pour la nage “libératrice”.

 

Toujours au MET, Chantal Thomas à la locution toute en précision, à la douceur de propos bien tranchés, a aussi été invitée à donner un atelier d’écriture et a pu trouver quelques minutes pour m’accorder une entrevue qui s’est avérée être plus une conversation qu’une interview. Une exception dans le lot des auteurs que j’avais l’habitude d’interviewer. Ouverte, à l’écoute, simple, directe, érudite, généreuse de son vécu, de son expérience et de son talent, elle semblait être d’un autre temps, celui des « grands », des Immortels.  

 

Chantal Thomas, 75 ans, est officiellement la dixième femme à intégrer l’Académie française. Elle prend place sur le fauteuil numéro 12, laissé vacant par Jean d’Ormesson, disparu en 2017. Directrice de recherche au CNRS, elle est avant tout une romancière et essayiste à qui l’on doit des dizaines de titres. Après « Souvenirs de la marée basse », « Est village Blues », en 2017 est aussi autobiographique, alors qu’après le confinement, en juin 2020, elle sort « Café vivre », un éloge aux cafés de Paris. “De sable et de neige”, son dernier ouvrage, qui “célèbre la beauté des choses et la puissance de leur silence”, est sorti le 7 janvier dernier, trois semaines avant son entrée à l’Académie française. 

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