Sur la « colline du tailleur », le quartier de Tallet el Khayat forme un entrelacs de rues très passantes que les automobilistes empruntent avec des gestes nerveux. La joyeuse sarabande est rythmée par les klaxons intempestifs sans lesquels on ne peut imaginer Beyrouth. Dans les films qui racontent des scènes de la vie quotidienne dans la capitale libanaise, la bande-son est souvent envahie par ces klaxons épars comme pour bien rassurer le spectateur de la sincérité du tournage. Dans les vieux feuilletons des années 70, la voix de la comédienne qui traversait la rue avec son fils pour aller à l’école, était couverte par les bruits typiques de la circulation beyrouthine. Aujourd’hui encore, résonne dans nos oreilles le grésillement caractéristique de ces bandes-son à la maladresse charmante.
C’est dans le grand bâtiment de la télévision libanaise à Tallet el Khayat, que se cachent les feuilletons interminables que l’on rêve d’exhumer et de revoir et qui faisaient pleurer ou rire toutes les familles libanaises. Ayant compris tout l’enjeu de préserver la mémoire de toute une période, la Fondation Liban-cinéma, la Mission culturelle française et Télé-Liban ont lancé, en novembre 2007, une opération de sauvetage des archives de la télévision libanaise. Ces archives, dans un état de délabrement inacceptable, représentent un trésor national, tant par les informations qu’elles recèlent que par la volonté de garder précieusement ces témoins du passé.
Le 28 mai 1959, les rares Beyrouthins qui possédaient un écran de télévision n’oublieront jamais les premières images diffusées à 18h30 sur la chaîne de télévision libanaise, à l’initiative de Wissam Ezzedine et de Joe Arida qui eurent l’idée de créer la Compagnie libanaise de télévision. Le canal 7 diffuse des programmes en langue arabe alors que le canal 9 est francophone. Les premières speakerines sont Najwa Kazoun, May Abdel Sater, Andrée Hani et Leny Naufal. La première émission retransmise en direct est l’inauguration de l’Exposition de la Cité sportive. Trois ans plus tard, une autre compagnie Télévision du Liban et d’Orient commence elle aussi à diffuser des programmes. Le Liban sera un des trois premiers pays au monde à émettre en couleurs, le 21 octobre 1967. Les deux sociétés se concurrenceront jusqu’à leur fusion en juillet 1977 en une seule télévision publique à 50%. Télé-Liban demeure la seule chaîne libanaise officielle jusqu’en 1985, date à laquelle des stations privées voient le jour.

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