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Beirut Hold’em signe le retour de Michel Kammoun au cinéma

27/07/2022|Amaya Singh

Quinze ans après Falafel (2006), Michel Kammoun est de retour au cinéma avec Beirut Hold’em (2021), dont la sortie en salle est prévue ce jeudi 28 juillet. Le titre du film est dérivé du nom d’une variante du poker, le Texas Hold’em, car l’intrigue se sert des jeux d’argent comme toile de fond pour livrer une description intimiste de la vie de la lower middle class beyrouthine. Beirut Hold’em est centré sur le personnage de Ziko, un ex-détenu de 40 ans qui, portant le fardeau d’un frère décédé prématurément et d’une histoire d’amour perdue, se laisse tenter par une dernière arnaque pour se remettre sur pied. Accompagné de ses trois amis d’enfance, un mécanicien, un jockey et un concessionnaire de voitures d’occasion, nous le suivons à travers un cycle de péripéties où la tragédie laisse occasionnellement place à l’humour. La prise de vue anamorphique, le choix récurrent de la caméra à l’épaule pour être au plus près des personnages et le fort contraste entre ombre et lumière donnent une esthétique soignée et originale à cette suspense story acidulée. 

 

Le réalisateur franco-libanais, qui s’est laissé convaincre par la praticité des services de streaming lors du confinement, a réalisé l’épisode sept (The Big Red Heart) de la série Love, Life and Everything in Between, diffusée sur Netflix depuis mars 2022. Malgré tout, il reste profondément attaché à l’expérience du cinéma et selon lui, Beirut Hold’em se destine à être vu sur grand écran. A l’occasion de la sortie en salle de son dernier long métrage au Liban, nous avons eu l’occasion de nous entretenir avec Michel Kammoun. 

Quand et comment vous est venue l’idée de faire ce film ? 

J’ai commencé à écrire ce film il y a plusieurs années. De nombreuses sources d’inspiration sont entrées en jeu. J’ai développé une sorte d’obsession à propos du fait de raconter l’histoire d’un homme qui tente de se relever après avoir tout perdu. Le film montre la manière dont je perçois notre vie ici : comme un jeu de hasard. 

 

Pouvez-vous commenter le titre du film, Beirut Hold’em

Il s’agit d’un jeu que j’ai inventé, dont le nom s’inspire du Texas Hold’em. L'intrigue du film est ancrée dans la ville de Beyrouth (plusieurs scènes ont été tournées à l’hippodrome de Beyrouth et des images du port avant l’explosion du 4 août 2020 figurent dans le film, ndlr) et le concept du jeu d’argent fait écho au quotidien des classes défavorisées dont font partie Ziko et ses amis, notamment vis-à-vis du manque de visibilité de ce qu'est constitué l’avenir, ici, au Liban. 

 

A propos de Falafel, vous disiez vouloir faire “un film qui ne soit pas un documentaire, ni une radiographie sur le Liban, mais un film libanais à dimension universelle”. Avez-vous eu la même vision pour Beirut Hold’em

Ma manière de voir les choses n’a pas changé, on retrouve mon ADN dans chacun de mes films. Je fais mes films comme je sais les faire. Pour tout vous dire, lorsque l’on réalise un film, on le fait d’abord pour soi-même et on espère que d’autres adhérerons à notre vision cinématographique.

 

Le tournage du film a pris place dans un contexte économique très difficile, couronné par la crise sanitaire et l’explosion du port. Comment le manque de moyens a-t-il influencé le résultat final du film ? 

Nous ne sommes pas à Hollywood. Ici, il est très difficile de faire un film. D’autant plus que Beirut Hold’em était un film ambitieux à réaliser car il comporte des cascades, des courses de motos et de chevaux… Il a fallu s'adapter sur le terrain, ce qui a impliqué de réduire les jours de tournage et de manquer d’heures de sommeil ! Le talent des acteurs a permis de combler le manque de moyens. Pour qu’un film voit le jour, c’est tout un travail d’équipe. Il faut aussi des gens qui misent sur le film et Sabine Sidawi [de la société de production Orjouane Productions] a tout fait pour que le film existe. 

 

Un mot sur le choix des acteurs. Pourquoi avoir choisi l’acteur palestinien Saleh Bakri pour jouer le rôle principal ? 

Lorsque l’on écrit un scénario, on se fait une vision abstraite des comédiens qui habiteront les personnages, c’est un vrai tâtonnement psychologique. Pour le rôle de Ziko, j’ai pensé à Saleh Bakri et c'était évident qu’il serait la bonne personne pour le rôle. Toutefois, il a d’abord fallu qu’il capte l’accent libanais et qu’il adopte les tics de langage d’un beyrouthin de la lower middle class. C’était une condition sine qua non pour qu’il joue le rôle de Ziko et il a dû suivre un coaching intensif pour y parvenir. 

 

Pourquoi y a-t-il une telle présence des rites religieux tout au long du film ? 

Au Liban, la religion de chacun est un fait connu de tous. Pour définir l’identité des personnages, il était primordial de montrer les différentes cérémonies religieuses qui ponctuent la vie des individus de cette tranche de la population et ce, afin de les ancrer au maximum dans la réalité de leur communauté. 

 

Le film comporte une scène d’explosion meurtrière. Quel écho cela a-t-il avec l’explosion du 4 août ? 

La scène de l’explosion a été écrite et tournée avant le 4 août. Je ne peux pas dire si cela était prémonitoire ou non mais les scènes d’explosion s’inspirent du vécu libanais. 

 

La musique qui accompagne le film est particulièrement belle. Qui a écrit la bande originale du film ? 

La musique a été spécialement écrite pour le film par la compositrice Cynthia Zaven. 

 

Dans votre film, les femmes semblent être un peu en retrait ou bien elles semblent n’exister qu’à travers les personnages masculins. Que répondez-vous à cela ? 

Les femmes ne sont pas en retrait, au contraire, elles font avancer le développement du film. Il est vrai que le film raconte l'histoire de Ziko et de ses copains mais les femmes sont extrêmement importantes dans leur vie. Par ailleurs, Ziko est le personnage le plus romantique que j’ai jamais imaginé. Je travaille comme un impressionniste, il y a tout un aspect sous-jacent dans mon travail : il faut savoir lire entre les lignes.

 

A savoir

Beirut Hold’em (1h36) de Michel Kammoun, au cinéma le 28 juillet 2022 

 

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