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Raymond Audi, PDG de Bank Audi, grand mécène

07/12/2016|Gisèle Kayata Eid

L’Agenda Culturel va à la rencontre de personnalités du monde culturel dont certains travaillent loin des projecteurs. Nous souhaitons rendre hommage à ces femmes et à ces hommes en témoignage de reconnaissance pour leur engagement dans la vie culturelle libanaise et pour leur contribution continue à son développement.

Ses médailles et distinctions ne se comptent plus, mais c’est son action pour le patrimoine et pour l’art graphique libanais qui impressionne encore plus chez ce grand donateur. Visite guidée dans un des plus beaux édifices beyrouthins, siège de la Banque, mais aussi galeries pour artistes.

Bank Audi Plaza donne le ton d’emblée. Bâtiments à l’architecture épurée, cours d’eau entre les immeubles, énorme sculpture de Dubuffet à l’entrée, le siège social de Bank Audi revêt des allures de musée contemporain. L’intérieur des deux édifices reliés par des structures en verre ne l’est pas moins. Bien au contraire. Dans l’antre de ce grand établissement, en plein cœur de Beyrouth, face à la mer, l’art pictural se porte bien. Très bien même. Des longs corridors jusqu’aux murs tapissés des huiles des grands maîtres, pas un bureau sans qu’une toile ne trône au-dessus, devant, sur le côté. Et cela se déroule sur plusieurs étages… Aucun doute que le maître des lieux est un amoureux d’art et de peinture.
Son propre bureau reflète d’ailleurs cette passion qu’il m’explique en détaillant une toile dédiée à l’or. Entre devises et art, les intérêts de Raymond Audi se superposent et se complètent.

Tout a commencé par l’initiation de son fils, philosophe émérite. ‘‘C’est mon mentor. Il m’a poussé à m’intéresser à la mosaïque’’ qui constitue le début d’une longue histoire d’amour avec les arts graphiques particulièrement. Précision qu’il tient à rappeler d’emblée : ‘‘Je ne suis pas du genre à m’intéresser à la culture dans son sens général : lecture et autres. Je suis plutôt dans l’art pictural’’. De la mosaïque, à la Villa blanche, qu’il transforme en musée, le chemin semble se tracer pour celui qui a fait du siège de la Banque un temple de l’art et dont le désir d’encourager les talents prometteurs n’a jamais fléchi.

C’est que le collectionneur en lui croit fort à la créativité des Libanais. ‘‘C’est quelque chose d’extraordinaire. Il y a une force de s’affirmer chez les Libanais’’. Et d’ajouter, mi-figue, mi-raisin : ‘‘Créateurs, mais également maîtres dans l’art de copier, ils ont le talent de nous ramener aux origines : les Phéniciens qui prenaient des objets et les vendaient de par le monde’’. Pourtant, il reconnaît que la culture libanaise est évolutive. ‘‘Il y a une jeunesse active qui se manifeste en créant quelque chose, parfois à partir de rien ; nos jeunes artistes concurrencent les œuvres européennes avec beaucoup d’art et de performance’’. 
Comment se porte le marché de l’art ? ‘‘Il est très commercial et permet de générer une plus-value considérable. Les galeries incitent les artistes à exposer, même si certains ne le méritent pas. N’empêche, il demeure que certains autres ont un véritable talent. J’ai beaucoup d’ambitions pour les jeunes artistes (son calendrier annuel leur donne une place de choix). Bien que les gens soient en général préoccupés par leur quotidien, il y a indéniablement une floraison de l’art : peinture, sculpture, nous avons des photographes magnifiques…’’
Bémol à cet enthousiasme : ‘‘On n’édifie pas pour l’avenir, bien qu’il y ait de plus en plus de gens qui s’intéressent à l’art. C’est la tranche de la société qui constitue la majorité silencieuse, qui n’ose pas s’affirmer, mais qui devrait changer le système’’.

Sinon, comment démocratiser la culture, la rendre accessible ? Le fondateur du Musée du savon de Saïda est catégorique : ‘‘Par des actions privées. Ici par exemple, nous organisons des ateliers gratuits pour les enfants des employés. Parce que le budget alloué à l’art par l’Etat est dérisoire. L’école fait ce qu’elle peut. L’université aussi essaye d’intéresser les jeunes ; et les festivals permettent aux gens de s’éduquer pour distinguer une bonne œuvre d’une mauvaise, tout en étant lucratifs’’.

La diaspora pourrait-elle jouer un rôle alors ? D’après Raymond Audi, cette dernière a parfois transplanté les problèmes du pays en terre d’accueil. ‘‘J’aurais souhaité qu’elle soit plus impliquée dans l’essor de l’art et des artistes libanais’’.

À propos du mécénat, son chantre au Liban estime que ce n’est pas un pilier pour la culture. Il avoue modestement qu’il essaye d’aider dans la mesure du possible, mais que son budget annuel est toujours très largement dépassé dès les premiers mois. Il confie toutefois que s’il a consacré autant d’espaces particuliers à autant d’artistes, c’est en grande partie pour contribuer à renforcer la réputation de la banque, ce qui le motive énormément.

On ne pourra que le constater dans toutes les pièces qu’il arpente fièrement pour se délecter de la vue des belles œuvres qu’il a acquises au fil du temps et qui ont chacune une petite histoire qui lui tient à cœur. Celle du mécène.
 

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