Pour le deuxième concert des Musicales du Liban en la cathédrale Notre-Dame du Liban à Paris, intitulé Piano du Liban et d’ailleurs, la jeune et talentueuse pianiste Aliénor Khalifé avec concocté un programme très original. Il alliait des pièces du grand répertoire pianistique à des œuvres de compositeurs libanais, plus confidentielles, mais démontrant la variété et la multiplicité de ce patrimoine musical que l’on ne se lasse pas de découvrir.
Jean-Sébastien Bach (1688-1750) pour commencer. La Sarabande extraite de la Suite anglaise n° 2. Poésie et pureté, assorties à la rigueur, forcent d’entrée de jeu l’admiration d’un public venu nombreux. Puis s’enchainent trois œuvres libanaises : Nocturne à la rose de Georges Baz (1926-2012), pièce dédiée à sa mère prénommée Rose. Elégance et émotion sont les maîtres mots du langage musical de celui que l’on appelait le « Debussy libanais ». Vient ensuite Andantino de Boghos Gelalian (1927-2011), où l’on retrouve l’inspiration de la tradition musicale arménienne, que le compositeur restitue avec son extraordinaire art de la polyphonie, enfin Mélodie d’automne de Bechara El Khoury (né en 1957), petite merveille de sensibilité et de mélancolie. Nous sommes ici face au grand sens musical de la pianiste, qui réussit à plonger chacune de ces pièces dans l’atmosphère qui lui est propre.
Puis voici Les 13 Variations sur un thème d’Anselm Hûttenbrenner en la mineur de Franz Schubert (1797-1828). Cette œuvre, inspirée par un quatuor à cordes de Hüttenbrenner, incarne le sens de l’amitié qui a toujours guidé la vie de Schubert. L’interprétation d’Aliénor Khalifé présente un mélange de force et de grâce infinies, tout en finesse schubertienne.
Reviennent alors les compositeurs libanais. Polka orientale de Wadia Sabra (1876-1952), que le public connaît surtout comme compositeur de l’hymne national libanais mais dont le répertoire pour piano est très injustement méconnu, L’Enfantine et la Valse éphémère deux petits bijoux d’inspiration romantique d’Abdel Rahman El Bacha, mondialement connu comme pianiste mais plus confidentiel comme compositeur, Variation sur un thème oriental de Toufic Succar, pièce qui a particulièrement plu, car elle est pleine de réminiscences d’une chanson traditionnelle connue de tous et Prélude n° 2 de Houtaf Khoury, œuvre forte et étrange qui a beaucoup intéressé.
Pour conclure en apothéose, la Ballade n° 3 de Frédéric Chopin (1810-1849), œuvre emblématique à la redoutable difficulté technique. L’interprète nous l’offre assortie d’une plénitude sonore, dans la douceur comme dans la puissance. Avec un subtil art des enchaînements, Aliénor Khalifé vise juste sans jamais surjouer.
Le public en redemande et Aliénor offre deux bis, un Nocturne d’Edvar Grieg (1843-1907) et clôture en beauté avec la pétillante Polka orientale de Sabra.
Beau deuxième concert que proposaient les Musicales du Liban, où le dialogue Orient-Occident prenait tout son sens. Rendez-vous dimanche 26 novembre avec le quatuor Sedecim, ou quand quatre musiciens français décident de s’attaquer à la musique savante libanaise !
ARTICLES SIMILAIRES
Petite messe solennelle de Rossini pour un grand concert réjouissant au Festival al Bustan
Gisèle Kayata Eid
20/03/2024
Laura Lahoud : « oui nous l’avons fait envers et contre tout »
Nelly Helou
20/03/2024
Riche saison hivernale à Beit Tabaris
Zeina Saleh Kayali
13/03/2024
Vernis Rouge : « Je suis fière de pouvoir représenter le Liban »
Garance Fontenette
07/03/2024
Abdel Rahman el Bacha en concert exceptionnel à Beyrouth
Gisèle Kayata Eid
03/03/2024
Mélodies françaises et libanaises par Marie-José Matar et Elie Sawma
Zeina Saleh Kayali
27/02/2024
De Kaslik à Erevan avec Betty Salkhanian et Georges Daccache
Zeina Saleh Kayali
25/02/2024
La musique : Un vecteur conducteur essentiel pour créer une véritable nation
Nelly Helou
20/02/2024
Orphée autrement avec La petite suite
Zeina Saleh Kayali
13/02/2024
Noémie Chemali et l’Opus 961
Zeina Saleh Kayali
07/02/2024