L’explosion qui a ravagé Beyrouth le 4 août 2020 causant des centaines de victimes, des milliers de blessés et des dizaines de disparus est une catastrophe nationale. Devant l’ampleur des dégâts qui ont transformé la capitale en une scène de guerre et qui n’ont épargné ni les vies humaines, ni les infrastructures, nul terme ne peut qualifier l’effroyable image du désastre.

Mais cet après-midi-là, un miracle s’est produit au Musée national de Beyrouth que la guerre civile n’avait pourtant pas épargné. Mis à part les portes et fenêtres vitrées qui ont volé en éclats, les ascenseurs défoncés, les panneaux signalétiques déchirés et gisants au sol, la collection exposée était là, debout, intacte. Dans une sérénité ocre si particulière à notre Musée national, les statues veillaient et les sarcophages immuables ont résisté comme incrédules à ce souffle ravageur. Malgré les débris de verre qui jonchaient le sol, qui recouvraient les mosaïques, nul objet n’avait été détruit. Même les cinq sculptures en marbre fièrement exhibées aux portes de l’entrée depuis leur restitution au Liban en 2018, sont demeurées intactes. Leur socle respectif en bois sévèrement égratigné témoigne pourtant de la force de l’impact. 

Un semblant de quiétude similaire enveloppe le premier étage et ses 70 vitrines qui ont étrangement conservé leur cloche vitrée. Quelques petits objets qui y étaient exposés ont simplement perdu leur équilibre séculaire, comme pour défier la barbarie ambiante.  

Des mains bienveillantes invisibles ont sauvé notre collection.

Peut-être pour nous rappeler la pérennité de notre culture et de notre patrimoine archéologique. 

Peut-être aussi pour nous donner le courage de continuer à le protéger.

Anne-Marie Maïla Afeiche

Directrice générale

Conseil général des Musées