Le béton pour édifier l’analogie Syrie - Liban. Dans chaque semblant de construction, les détails sont d’une symbolique tragique. Des planches de bois reliant les bouts d’un bâtiment mutilé, à cette tranche de matelas qui se meurt dans une étreinte douloureuse avec la pierre, chaque pièce hurle la présence trop bruyante de la guerre dans le quotidien. Ou ce qu’il en reste. Dans cette apocalypse improvisée, un matériau revient sans cesse : les armatures de fer, souvent laissées à l’air libre par les constructeurs au Liban, dans l’optique qu’un étage supplémentaire viendrait s’ajouter. Cet étage, c’est le destin des pays en guerre, celui du Liban malgré l’Accord de Taëf. Construire, détruire. Recouvrer l’espoir de construire à nouveau. Mais s’emmurer inexorablement dans l’emprise de leur destinée ferreuse.

Du souk al Raouché au port de Beyrouth, la destruction à vol d’oiseau. C’est un hommage à Beyrouth, une mise en scène de son fatum monochrome. La salle s’ouvre sur le bâtiment de la Coop - projet capitulé en 1982 - et file tout droit jusqu’à la somptueuse représentation du port amputé, immortalisée par la craie sur un fond noir. Comme une histoire qui s’écrit seule. Sur ce sentier linéaire, les débris de la ville s’érigent en œuvres d’art. Ils investissent les lieux. Assemblés, accrochés ou compressés, les métaux ramassés au lendemain du 4 août, ostensiblement tavelés de leur suie d’hier, évoquent la malléabilité de ces évènements que le Liban ne saurait éviter.

« But the trees kept voting for the Axe ».Le titre de l’exposition suggère lui-même la continuité qui aurait pu sonner le glas du pays des cèdres, si celui-ci ne renaissait pas inlassablement de ses cendres. Derrière le tableau du port, une autre fresque lui murmure, dos au mur. Ce bastion de la vie libanaise, c’est Beyrouth by the sea, cette œuvre où la capitale est belle parce qu’un rien la dessine, parce qu’un vide l’emplit. Parce qu’ici, tout est encore à faire, dans ce schéma répétitif de l’anéantissement et de l’éternel recommencement.
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