Quentin Müller, journaliste et photo-reporter indépendant spécialiste du Moyen-Orient et de la péninsule arabique expose une série de photos consacrées au Yémen à Paris.
Sublime joyau niché entre la chaîne de montagnes d’Haraz et à cheval entre la mer Rouge et la mer d'Arabie, le Yémen est aux prises d’un sanglant déchirement depuis le début de la guerre en 2015. Bruyamment relayée un temps, l'actualité du pays, jadis Arabie Heureuse, a vite été remplacée dans les médias étrangers, et surtout occidentaux, le laissant vaciller dans le trou béant de l’indifférence et de la fatalité. Quentin Müller, a souhaité rompre avec le récit de guerre pour dévoiler la beauté tenace et ineffable du Yémen.
De son dernier voyage en 2021, il revient avec une série de photographies intitulée « Yémen, l’hydre de la guerre à plusieurs visages : les hommes et l’environnement ». Au travers de ses prises de vues, se dévoilent tantôt des paysages arides, escarpés, des oasis de poussières à flanc de montagnes. Tantôt des édens luxuriants où les repères terrestres semblent avoir laissé place à une nature venue d’un autre monde. « J’ai vraiment eu le sentiment que mon avion allait se poser sur une planète extraterrestre, que j’allais découvrir des éléments nouveaux, que j’allais sortir pour un moment de l’espace terrestre et de ses redondances mondialisées. » Si le journaliste y revient toujours avec la même intensité dans le regard, c’est peut-être parce que face aux atrocités endurées depuis sept ans par les Yéménites et à la destruction de leur environnement, il ne compte pas les fois où il a été « ému aux larmes devant ces courbes, ces dessins si étrangers ». Une émotion qui vous saisit et vous suit à la trace en parcourant l’exposition. La vie en déborde, sort du cadre de l’image qui semble s'animer sous les yeux du visiteur. À l’instar de cette scène où quatre enfants, de l’eau jusqu’aux chevilles, tentent de sortir leurs scooters enlisés dans un étang creusé par la saison des pluies, sur l’île surréaliste de Socotra. Même les paysages de montagnes, à l’allure souvent figée et rigide, semblent évoquer toutes les vies qui les ont traversées. Comme celles du gouvernorat de l’Hadramaout, à peine perceptibles, dissimulées par une épaisse poussière ocre. Le beau se glisse partout où il le peut.
À l’issue de cette exposition, il est permis de se questionner sur la fatalité qui entoure les pays en guerre. Devraient-ils y être réduit ? La guerre doit-elle tout emporter sur son passage, occulter la vie qui continue et la nature qui prospère tant bien que mal ? « Yémen, l’hydre de la guerre a plusieurs visages : les hommes et l’environnement », seize photographies pour montrer une autre image du Yémen et questionner outre les conséquences humaines (400.000 morts depuis 2015), celles environnementales.
Les roches, l’eau, la flore, la faune. Ici, la nature toute entière se révèle en éternelle survivante et nous raconte en silence les souffrances qu’elle devra surmonter pour résister à l’Homme.
A savoir
Espace Cultur’Ailes
Jusqu’au 28 juin
35 rue Colonel Rozanoff
75012 PARIS

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