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BEYROUTH BY DAY: Nasra

05/05/2021|Tania Hadjithomas Mehanna

C’est autour de l’école du même nom que s’est développé le quartier bénéficiant de la proximité du balad, le cœur battant de la ville, avec un bruit de fond incessant comme unique constante. Mille allées et venues catalysées autour du secteur Sodeco, du nom d’une société de construction, donnent au quartier de Nasra une dynamique heureuse, un temps ralentie par une ligne de front Primo-Sodeco dont on voudrait oublier le nom. L’esprit de Beyrouth se retrouve dans Nasra, sans oublier l’Histoire puisqu’en 1923, dans les fondations d’une construction, quatre sarcophages en plomb ont été découverts.

 

Le cadre de la Faculté française de médecine est magnifique et les arbres plus que centenaires sont tous désignés par leur nom scientifique. Une vraie promenade botanique donc dans un des rares espaces verts de la capitale. C’est en 1883 que les premiers cours sont dispensés par des professeurs français dans ce qu’on appelle alors l’École française de médecine que gèrent les pères jésuites et qui est située rue Huvelin. Cette école deviendra Faculté de médecine et de pharmacie en 1888 mais, très vite, se heurte à l’exiguïté de ses locaux. Le transfert de la Faculté vers d’autres lieux est alors envisagé. La première pierre des nouveaux bâtiments est posée le 21 novembre 1911 sur un terrain acquis en 1901 par les pères Jésuites et où ils avaient déjà aménagé un grand jardin. La rentrée 1912 se fera rue de Damas. Une école dentaire est juxtaposée en 1920 et une école de sages-femmes suivra l’année suivante. L’inauguration en 1923 de l’Hôtel-Dieu de France, hôpital universitaire, consolide cette institution. 

 

Sodeco. Point de passage. Le bruit ne désemplit pas et les axes se remplissent de milliers d’échanges. Sodeco. Point de non-passage. Durant trop longtemps, ce secteur était une ligne de démarcation. Ce terme qui semble désigner une ondulation géographique signifiait en réalité, francs-tireurs, barricades, barrages, échanges de tirs et d’obus de tous calibres. L’immeuble Barakat situé au coin de deux rues porte encore les stigmates de l’enfer qu’a traversé cet axe crucial ; des inscriptions sur les murs font froid dans le dos et rappellent le temps où les miliciens avaient coupé la ville en deux. Voué à une démolition certaine, il est finalement épargné en raison d’abord de sa grande valeur architecturale et aussi parce qu’il symbolise la mémoire de Beyrouth. Dans le cadre du projet ARCHIMEDES, la municipalité de Beyrouth a acquis cet immeuble jaune construit en 1932 et destiné à devenir « La Maison de la ville » Bayt el Madina. Les travaux qui vont débuter en avril 2010 vont permettre l’élaboration d’un musée dédié à la mémoire, d’un observatoire de l’urbanisme qui fera le lien entre les projets concernant la ville de Beyrouth et le public, d’un centre d’archives et de documentation lié à la capitale ainsi qu’une plate-forme de rencontres où des séminaires et des conférences seront organisés. 

 

Nasra a le goût d’hier pour Rodolphe Paulikevitch qui a grandi dans ce quartier : « J’ai trois souvenirs dans la tête : un qui est auditif puisque, dans mon enfance, tous les matins à 5h30, j’entendais le bruit des chevaux qui sortaient des écuries situées à la place du four Beydoun et qui se dirigeaient vers l’hippodrome. Le second est olfactif avec les magnolias qui inondaient les lieux. Et le troisième est visuel avec les centaines de marchands ambulants, de portefaix et de journaliers qui se disputaient, sans oublier le tramway. J’ai fait ma première communion à l’église de la faculté de médecine, rue de Damas. Cet arbre au milieu mesurait trois mètres à l’époque où ce quartier faisait la jonction avec le centre-ville. On vivait en harmonie totale les uns avec les autres. Les juifs, les chrétiens, les musulmans. C’est en 1958 que les choses ont commencé à changer. »

 

En 1868, à la demande de Rome, Mère Pauline de Vaux, supérieure générale de la congrégation des Dames de Nazareth, débarque à Beyrouth avec pour tâche d’ouvrir un établissement éducatif et un couvent. Elle se met aussitôt en quête d’une maison pour abriter son école. Le marquis Moussa de Freige met alors à sa disposition une de ses propriétés de Beyrouth appelée « le château bleu ». Le 7 octobre de la même année, le collège abrite quinze pensionnaires et six religieuses. Il connaît un tel succès qu’il faut bientôt trouver un terrain pour construire un grand bâtiment qui abriterait également le couvent. Deux terrains retiennent alors l’attention de la Supérieure, l’un situé en bord de mer et l’autre sur la colline d’Achrafieh, appelée également colline Saint-Georges. Pour délimiter son choix, Mère de Vaux place un quartier de viande sur les deux emplacements préconisés. Vingt-quatre heures plus tard, il s’avère que le morceau de viande posé sur la colline avait mieux résisté au temps ; l’air y était donc plus salubre. Sa décision est irrévocable. En 1871, les travaux débutent avec peu de moyens et se poursuivent grâce aux dons de généreux bienfaiteurs. Le 10 septembre 1873, le jour tant attendu est enfin arrivé, et la colline vit désormais au rythme des prières, des cloches et des pas studieux de 43 élèves. Mais la véritable rentrée scolaire se fait en octobre 1874 avec 60 pensionnaires et 200 élèves qui étudiaient gratuitement dans l’esprit de ce qui a toujours été une école pour tous et surtout pour les plus démunis. Le collège continue de s’agrandir en nombre et en hauteur avec des bâtiments de toute splendeur, aux cloîtres blancs à ogives orientales. En 1893, la statue de la Vierge, instituée gardienne de la demeure, est installée dans la cour principale. 

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