Dans le cadre du Festival de théâtre Européen, les planches du théâtre al-Madina ont accueilli, le 19 et 20 octobre, ‘Not long ago’, pièce musicale écrite, mise en scène et interprétée par Nidal al-Achakar. Il était une fois, le village de son enfance.
Sur la scène du théâtre al-Madina, est posée une estrade surélevée de quelques centimètres, et entourée dans sa partie supérieure d’une guirlande de lampions allumés. Cinq chaises sont placées presque en demi-cercle sur cette estrade. D’emblée ce décor ranime tout un imaginaire collectif, même auprès des générations qui ne l’ont pas connu, mais qui l’ont entendu par leurs parents et grands-parents, un univers qui survit encore dans les villages du pays, sur la place centrale : un lieu de retrouvailles, de rencontre, de joie et de musique. Le lieu des souvenirs d’enfance de Nidal al-Achkar qu’elle fera revivre durant une heure environ. Fleur piquée à l’oreille, jupe longue et fleurie, ainsi qu’un châle tout aussi fleuri, Nidal al-Achkar apparait, telle une vraie gitane, comme cette petite gitane dansante qui égayera ses propos de la fraicheur de son insouciance, et qui restera dans les souvenirs du spectateur.
Il était une fois, dans les années 40 du siècle passé, le village des ancêtres de Nidal al-Achkar, cet espace qui fut son premier théâtre. Tout au long de la pièce, Nidal al-Achkar déroule son enfance dans une famille engagée, dans une maison engagée qui a vu accueillir beaucoup de personnages. Des personnages qui depuis sont morts, exilés, immigrés, ou tués, et que Nidal al-Achkar ranime, le temps d’une soirée. Face à une salle comble, elle raconte des anecdotes de sa vie, à travers les yeux de l’enfance, se jouant des mots et des jeux de mots, de leur allitération, de leur puissance et de leur impact. Il y est question d’engagement et de prison, mais aussi de l’innocence d’une personne qui se construit, de la première lutte remportée contre la brebis du jardin, à la première danse en public. Oscillant entre légèreté et sérieux, les histoires s’égrènent, tantôt près des larmes, tantôt près du sourire. Mais toujours au creux du rêve.
Véritable hakawati, Nidal al-Achkar s’improvise également interprète chanteuse dans ‘Not long ago’, puisque entre chaque pan d’histoire racontée, retentit une chanson, toutes puisées elles aussi de notre imaginaire collectif. Elle est accompagnée sur scène du musicien et chanteur Khaled al-Abdallah, ainsi que de Mohamad Akil, Nabil al-Ahmar et Ibrahim Akil. Oud, nay et percussions s’entremêlent aux rythmes de tout un pays, de toute une région. La fréquence des chansons est telle que ‘Not long ago’ semble relever plus d’un concert que d’une pièce de théâtre, s’inscrivant davantage dans l’instantanéité que dans l’enracinement.
A chaque rythme entonné, à chaque refrain énoncé, le public y va de son enthousiasme, de son plaisir de voir s’entrechoquer les mots qu’il connait si bien, et qui composent son histoire, une histoire à la fois personnelle et collective. Tout au long de la pièce, on sent une nostalgie latente qui se faufile à travers les mots portés haut la voix, et voilà qu’elle se dévoile à la fin, cette nostalgie. Il était une fois, dans un espace-temps pas si lointain que ça, un village à l’image d’un pays, peuplé de personnages hauts en couleur et de leurs rêves. Il était beau ce passé-là.
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