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Sara Abou Mrad ou un monde enchanté de couleurs

25/10/2021|Zeina Saleh Kayali

Comment êtes-vous êtes « tombée » dans la peinture ?

J’ai vécu une enfance très riche en couleurs car mon père était artisan, tapissier d’ameublement et c’était fascinant pour la petite fille que j’étais d’évoluer parmi les étoffes, la matière brute, le coton, le bois, la paille, les fils colorés… Son atelier était tout un monde pour moi et j’y passais énormément de temps. Je demandais régulièrement à ma mère de m’y emmener pour jouer. Je prenais des morceaux de bois, des outils que je ne savais pas utiliser, et j’allais dans le jardin pour creuser pour faire des fleurs.  C’était un monde de détails magique et merveilleux et je passais mon temps à dessiner, bien que n’ayant pas reçu de formation classique dans ce domaine. Je n’étais pas intéressée par la télévision ni par les jouets. J’adorais le dessin et le football et cette joie de dessiner m’habite depuis l’âge de 9 ans. Certains éléments de mon œuvre actuelle existaient déjà à cet âge-là. Ils ont bien sûr évolué depuis ! 

 

Vous avez toujours été fortement attirée par les couleurs ? 

Oui et les couleurs que j’utilise aujourd’hui sont les mêmes que celles de mes dessins d’enfance, palette de rose, bleu, vert… J’étais d’ailleurs depuis toute petite très attirée par les crayons de couleurs. A l’école si je voyais un crayon par terre je demandais à qui il était et si personne ne le réclamait je le mettais dans une boîte que j’ai jusqu’à aujourd’hui ! De même quand j’ai été enseignante, si je trouvais des crayons de couleurs abandonnés en classe et que personne ne réclamait, ils allaient rejoindre la boîte. Je n’ai jamais acheté une boite de couleur parce que les couleurs que j’utilise sont celles que j’ai trouvées au fil du temps. C’est une collection unique et originale qui ne se trouve pas dans le commerce. Certains crayons sont devenus trop petits à force d’être taillés.

 

Comment avez-vous poursuivi votre parcours artistique ? 

A partir des classes secondaires, les choses se sont imposées à moi, je voulais être comme Picasso ! Je me suis alors inscrite pour un diplôme en arts plastiques à l’Université libanaise. Je voulais apprendre la technique du dessin. Et là j’ai découvert que j’avais du talent. Matilda a alors a commencé à prendre une place centrale dans mon parcours artistique. Tout tournait autour d’elle.

 

Justement, qui est Matilda, ce personnage récurrent de votre œuvre ?

Matilda a commencé à exister depuis mon adolescence. J’étais très timide et n’osais pas raconter ce que je ressentais à mes parents par peur de leur montrer ma faiblesse ou pour ne pas les inquiéter. Alors j’ai commencé à dessiner ce personnage sans nom au début. Comme un autre moi-même. Son allure n’a pas changé au fil des années et c’est d’elle que naît l’émotion dans mon œuvre. Elle voltige d’une toile à l’autre et est porteuse de rêve. 

 

Vous avez alors commencé à exposer vos œuvres ? 

Oui, plusieurs expositions collectives au Liban et, en 2010, ma première exposition individuelle. J’avais loué en espace à Beyrouth et j’ai exposé la première série de Matilda à une échelle réelle du corps humain. J’avais imprimé mon propre corps sur les toiles et j’ai fait des retouches de peinture par-dessus. Puis en 2015 j’ai été invitée par une ONG à exposer mes dessins sur papier en noir et blanc. Ils racontaient une déception amoureuse. Sur le moment je n’ai rien vendu, mais après l’exposition, toute la collection a été vendue. Il y avait 130 dessins et six peintures à l’huile. Tous les acheteurs étaient des collectionneurs et c’est ainsi que j’ai commencé à recevoir des commandes de personnes qui suivaient mon travail et attendaient ma production. 

 

Vous dites que souvent l’on vous achète une série d’œuvres ? 

Oui et c’est ainsi que j’ai compris que la force de mes dessins consistait surtout dans le fait de constituer un tout. Chaque élément raconte une émotion et l’ensemble forme une œuvre. Aujourd’hui, chacun de mes tableaux raconte une histoire, c’est en cela que mon œuvre a beaucoup évolué. 

 

Comment avez-vous rencontré Claude Lemand ? 

En répondant à une compétition lancée par le fonds Claude et France Lemand et le musée de l’IMA juste après l’explosion du 4 août. J’ai envoyé la photo d’une seule œuvre. En octobre M. Lemand m’appelle, m’annonce que j’ai gagné la compétition et qu’il va m’acheter une œuvre qui figurera dans la collection permanente du musée de l’IMA. Quand par la suite je l’ai rencontré et qu’il a vu mon travail, il a proposé d’être mon galeriste. Avec lui, je peux enfin peindre ce que j’ai envie, et non ce que le galeriste a envie d’exposer.

 

Que faut-il vous souhaiter ?

Maintenant que j’habite Paris, je commence à me sentir un vrai peintre, car au Liban je n’étais pas considérée comme une professionnelle et mon œuvre était considérée comme trop onirique et osée (notamment à cause des nus). Je souhaite bien sûr que mes tableaux soient plus connus. On me dit qu’ils sont frappants on ne peut pas passer à côté. Alors croisons les doigts ! 

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