La photographe libano-française Randa Mirza remporte le Prix Camera Clara 2025, distinction dédiée aux travaux inédits réalisés à la chambre grand format. Sa série Atlal (Ruines), consacrée aux villages du Sud-Liban bombardés entre août et décembre 2024, sera présentée à la BnF – site François-Mitterrand du 16 décembre 2025 au 29 mars 2026 (vernissage le 15 décembre), dans le cadre du cycle « La photographie à tout prix. Une année de prix photographiques à la BnF ». 
Atlal renvoie au prologue des poèmes préislamiques et à une iconographie libanaise hantée par les traces. Chez Mirza, les « atlal », amas de pierres, blessures du paysage, deviennent le théâtre d’une mémoire qui résiste. S’appuyant sur la distinction posée par l’historien d’art H. W. Janson entre ruine (fenêtre sur le passé) et décombres (masse informe), l’artiste cherche à redonner présence et historicité à des maisons réduites à des matériaux « voués à l’effacement ». Le temps long de la chambre, Mirza travaille à la Crown Graflex 4×5, transforme chaque prise de vue en rituel de dénonciation, de réparation et de résistance, au service d’images d’une grande précision des détails et des dégradés. 
 Édifice détruit par les bombardement israéliens au Sud Liban en 2024 © Randa Mirza
Édifice détruit par les bombardement israéliens au Sud Liban en 2024 © Randa Mirza
Une œuvre entre document et réparation
Née à Beyrouth en 1978, Randa Mirza vit entre Paris et Beyrouth. Artiste pluridisciplinaire (photo, vidéo, installation, performance), elle interroge les conditions de production des images et les constructions socio-politiques qui les sous-tendent. Son travail, situé entre document, expression personnelle et écriture artistique, prend régulièrement pour objet les traces de la guerre civile libanaise et les politiques d’urbanisme qui ont remodelé la ville. On pense notamment à Beirutopia, lauréat du PhotoFolio Review aux Rencontres d’Arles 2023 (exposé en 2024). Expositions monographiques et collectives jalonnent son parcours (Fotomuseum Den Haag, Fotohof, Biennale des photographes du monde arabe, MUCEM, IVAM, Sursock Museum, Visa pour l’Image). Elle est représentée par la Galerie Tanit (Munich/Beyrouth). 
Le Prix Camera Clara, la lenteur comme manifeste
Créé en 2012 à l’initiative de Joséphine de Bodinat-Moreno, le Prix Camera Clara distingue chaque année un travail inédit à la chambre et offre au lauréat 8 000 € ainsi qu’un accompagnement à la production d’une exposition. À l’ère de la profusion d’images instantanées, le prix revendique la lenteur : pose, composition, intériorité. Depuis 2023, les lauréats bénéficient d’une exposition de quatre mois à la BnF, et depuis 2024, un tirage de la série primée est donné à la BnF par l’artiste et la fondation Grésigny, qui soutient le prix. Le jury 2025 réunit historien·ne·s, conservateur·rice·s, commissaires et professionnel·le·s de l’image. 
Avec Atlal, Mirza déplace la photographie de guerre vers une liturgie du regard : au lieu de capturer l’instant, elle recompose le temps et réinscrit les ruines dans une continuité littéraire, esthétique et historique. C’est une série à la fois ancrée dans le Sud-Liban et porteuse d’une portée universelle : comment regarder les décombres sans renoncer à la mémoire ? Une exposition-repère de fin d’année à Paris, importante pour la scène libanaise et au-delà. 
Infos pratiques
Exposition : Randa Mirza – Atlal (Ruines)
Où : BnF – François-Mitterrand, Paris
Quand : 16 décembre 2025 → 29 mars 2026
Vernissage : 15 décembre 2025
 
 Édifice détruit par les bombardement israéliens au Sud Liban en 2024 © Randa Mirza
Édifice détruit par les bombardement israéliens au Sud Liban en 2024 © Randa Mirza
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