Les 26 et 27 avril dernier, la start-up ELFAN célébrait ses deux ans d’existence en organisant un Pop-Up dans la boutiqueshowroom Aalamuna, située dans le troisième arrondissement de Paris. Y étaient exposées les œuvres de douze artistes libanais, de toutes les catégories des arts visuels que promeut ELFAN à travers son répertoire en ligne, régulièrement complété. L’Agenda Culturel s’est entretenu avec Fabienne Touma, peintre/illustratrice, curatrice d’art et créatrice d’ELFAN qui se propose de promouvoir, conseiller et accompagner les artistes libanais dans leur parcours.
L’histoire de ELFAN a commencé par la création du répertoire « Portraits d’artistes libanais ». En quoi cela consiste-t-il ?
L’idée m’est venue il y a deux ans. Je voulais créer une sorte de catalogue répertoriant le plus possible d’artistes libanais toutes catégories confondues, quel que soit leur domaine. Ce catalogue, un peu à l’image des FRAC en France, est régulièrement complété. Une fois ce catalogue disponible en ligne, les clients peuvent choisir parmi les profils présentés selon ce qu’ils recherchent, ou je peux moi-même démarcher pour ces artistes auprès de tel ou tel événement et entreprise selon leurs besoins.
Ce pop-up à Paris célébrait les 2 ans de la création de « Portraits d’artistes libanais ». Les œuvres présentées étaient celles de la catégorie des arts visuels, la première de ce répertoire. Cela a été un moment très important pour moi parce que c’était la première fois que je parvenais à faire venir des œuvres directement du Liban. Jusqu’ici, avec ELFAN, je ne présentais que des œuvres immédiatement disponibles, en France et en Belgique principalement.
Justement, qu’est-ce que ELFAN ?
« ELFAN » signifie « L’Art » en arabe. Répertorier les artistes libanais ne suffisait pas, je voulais aussi leur donner de la visibilité, les accompagner à travers des techniques que j’ai découvertes dans le système culturel français, qui permettraient au système culturel libanais de se développer tout en respectant son identité.
J’ai fait mes études académiques et artistiques en France. Je suis diplômée en histoire de l’art avec une spécialisation en ingénierie culturelle et j’ai suivi plusieurs formations en arts du spectacle. Je connais donc très bien le fonctionnement du système culturel français.
Étant également artiste en parallèle de ma profession de curatrice d’art, cela me permet d’offrir aux artistes un cadre de travail optimal, alliant la rigueur du système culturel français à une compréhension sensible de leur travail dans le système culturel libanais, grâce à mon propre parcours artistique.
ELFAN c’est essentiellement ça : sensibiliser les artistes libanais aux mécanismes du système culturel français, afin qu’ils puissent en retenir ce qui leur convient et l’adapter à leur propre pratique ainsi qu’au contexte culturel libanais. Ceci dans une perspective d’évolution de leur travail.
ELFAN me permet donc de les suivre, de les accompagner, et de leur créer des opportunités. Cela peut-être au moyen d’expositions collectives comme ce pop-up à Paris, mais aussi en les mettant en relation avec des entreprises selon leurs besoins. Par exemple, pour le Festival du Film Libanais de France, j’ai proposé des artistes du répertoire ELFAN pour produire l’affiche de la 3ème édition du Festival ainsi que celle de leur dernier évènement sur le cinquantenaire de la guerre du Liban qui a eu lieu en avril.
Votre entreprise vise-t-elle uniquement à promouvoir les artistes libanais en France ?
Non, pas seulement. Je fais régulièrement des voyages au Liban où j’organise essentiellement des expositions pour les initier à la médiation culturelle, l’un des aspects les plus importants du système culturel français. Je trouve ce dernier remarquable, et j’essaie de l’adapter au Liban tout en conservant son identité culturelle ; en transmettant aux artistes des petits conseils, des astuces pour développer leur travail et que leur carrière soit en constante évolution. Bien sûr je les encourage à voyager et saisir les opportunités qu’on leur propose ailleurs, mais je pense aussi qu’il faut parfois savoir revenir, et ramener avec soi le savoir et les leçons que l’on a tiré de ces expériences à l’étranger.
Nous sommes comme des ambassadeurs. À l’étranger nous sommes là pour attirer le regard, éveiller l'œil sur ce qu’il se passe dans notre pays et témoigner de la formidable effervescence culturelle qui le remue. Je suis sûre que la situation va s’améliorer.
Le Festival International du Court-Métrage de Clermont-Ferrand, qui s’est déroulé en janvier dernier, a sélectionné le Liban cette année pour son Focus. Est-ce là la marque d’un intérêt croissant pour les productions artistiques libanaises ?
Absolument, j’en suis certaine ! Je me suis rendu cette année au festival, et chacun des films libanais étaient projetés coup sur coup à guichet fermé. J’y étais en reportage pour Ici Beyrouth, et les spectateurs que j’ai rencontrés témoignaient tous d’une grande curiosité et d’un profond enthousiasme.
J’ai observé un phénomène similaire lors du pop-up de ELFAN à Paris. Je devais ouvrir de 11 à 20h le samedi, et à 22h je chassais encore les gens pour fermer ! Il y avait des Libanais, des Français, des Américains, des Chinois ou encore des Allemands. Et quand je demandais aux visiteurs comment ils avaient entendu parler de l’événement, la plupart me répondaient qu’ils avaient simplement vu le drapeau libanais que j’avais placé devant la porte et s’étaient décidés à entrer. Je suis convaincu qu’il y a une opportunité à saisir pour notre pays d’attirer l’attention sur ce bouillonnement artistique qui le traverse, et lui donner ce coup de pouce qui lui permettra d’éclore avec toute sa vigueur.
ELFAN est encore seulement une plateforme internet. Envisagez-vous de vous installer plus durablement par la suite ?
Oui, c’est dans mes plans. J’aimerais beaucoup ouvrir des locaux dans Paris, mais pour le moment, j’ai encore envie de me déplacer, faire découvrir un peu partout l’art libanais et d’aller à la rencontre des différents publics.
ARTICLES SIMILAIRES
Hommage à Pierre Audi
Zeina Saleh Kayali
05/05/2025
Neuvième campus pour l’USJ dans la maison de Charles Corm
Briac Saint Loubert Bié
04/05/2025
Haush al Ghanam, la saga délice de Faysal Saab
Noha Baz
04/05/2025
Écrire, pourquoi ?
Ramzi Salman
04/05/2025
Rencontre avec Me Ziyad Baroud : « Paix et justice : Une mémoire pour l’avenir ? »
Lila Kasparian
30/04/2025
Rendez-vous avec soi-même
Ramzi Salman
30/04/2025
Venus Wine redonne de la valeur au vin par l’art
Briac Saint Loubert Bié
27/04/2025
Déjeuner chez Monsieur Dior
Noha Baz
25/04/2025
À table by Le Blanc : Un nouveau lieu de réception à deux pas de Beyrouth
25/04/2025
Agenda Culturel #610 du 23 avril au 19 mai 2025
24/04/2025