‘Caminante’ est une exposition immersive multimédias réalisée en collaboration avec l'Institut Cervantes de Beyrouth et dirigée par Madame Yolanda Soler Onis, directrice de l'Institut. Elle offre une réflexion profonde sur la condition humaine et les défis contemporains auxquels nous sommes confrontés. Alida Torbay nous en dit plus.
Pourquoi le choix du titre “Caminante” pour votre exposition et que symbolise ce choix ?
En réalité, le projet a été inspiré par le poème de Antonio Machado « Caminante, il n’y a pas de chemins tracés, le chemin se fait en marchant ». C’est un peu une réflexion sur la vie ; on la traverse et on regarde derrière soi. Il n’y a pas de traces. Les traces du chemin n’existent pas. Elles sont en nous ; on les porte. C’est le reflet de notre unicité et de notre identité. Bien sûr, dans un cadre uni d’humanisme universel. C’est pourquoi je commence l’exposition par une sculpture en bronze et en résine qui reflète le « Caminante ». Cela n’a pas de genre ni d’identité. C'est une figure universelle à laquelle tout le monde peut s’identifier. Les pas de géant indiquent le début du chemin. Ils sont réels et deviennent plus tard virtuels tout comme le « Caminante ».
Vous avez utilisé plusieurs matériaux dans votre exposition ainsi que la technique de la réalité immersive. Parlez-nous de votre approche.
Effectivement, je commence l’exposition avec la femme à la valise ouverte. C’est l’émigré. Pour la première fois, l’émigré est une femme. Elle a sa valise ouverte et y transporte le temps et un passeport sur lequel elle a inscrit : « ôtez de mon identité le passeport pour refléter l’universalisme de l’être. » La fille au ballon et la fille au masque sont toutes deux jeunes et elles rêvent. Ces sculptures sont en bronze car j’aime beaucoup le bronze. C’est un matériau solide et non éphémère. Il est lourd et résiste au temps.
Le « Caminante » guide vers la salle où l’exposition commence par un « Statement » sur ce qu’il a vu sur son chemin. Son parcours nous révèle ce que le monde est devenu ainsi que son regard sur le monde. On entre dans la réalité immersive qui reflète la virtualité. On est devant un fauteuil somnambulesque qui nous fait découvrir le monde d’Orwell. Là, la mariée représente Gaïa malade. Dans cet espace que j’ai voulu immersif, j’utilise une infinité de matériaux, des vidéos, de la résine, du polyester. Nous avons dans notre monde contemporain une infinité de moyens pour faire la sculpture. Pour moi, le plus important c'est le message et pas le matériau.
Comment êtes-vous passé du droit, de la bioéthique, de la philosophie et de l'entreprenariat vers l’art et la sculpture en particulier?
Effectivement, j’ai étudié le droit à l’USJ, ce qui m’a donné une excellente formation. Quand on a découvert le génome humain, il m’a fallu comprendre où va le monde. Donc j’ai dû étudier la bioéthique, la philosophie et la sculpture. Pour moi, ces disciplines se complètent et se retrouvent car l’art est un moyen qui nous permet de comprendre qui nous sommes et vers où nous allons. Il a fallu travailler pour pouvoir faire tout cela.
Quelle est l’influence de votre séjour au Venezuela sur votre vie et votre art ?
Le Venezuela est mon second pays. J’y ai appris la philosophie et l’art. J’y ai découvert un monde accueillant, réconcilié avec la nature, avec l’homme qui est au centre de cette nature ; j’ai découvert un autrui qui m’a permis de me réconcilier avec moi-même, qui m’a ouvert les portes vers un universalisme sans frontières. A partir du Venezuela, j’ai découvert que le monde est un grand village. Les hommes se ressemblent tous. Autrui peut être notre propre reflet. Le plus important dans le cheminement que nous faisons, c’est de savoir que sans l’humanisme universel la terre sera vouée à la perdition. L’évolution technique pourra sombrer dans le Transhumanisme. Nos libertés, nos démocraties sont fragiles et en danger. A n’importe quel moment, nous pouvons sombrer dans le Big Brother, Fake News, etc. Si nous ne revendiquons pas notre humanisme, nous n'aurons besoin ni d’identité ni de genre ni de nationalité ni de frontière pour retrouver notre essence et nous réconcilier avec l’HOMME. Il faut simplement être bienveillant et être soi-même.
Merci à l’Institut Cervantes de Beyrouth et à sa directrice Yolanda Soler qui m’ont permis d’exposer mes œuvres.
Photo @Joe Bark
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