"Au Commencement... Une Histoire Humaine"
Un spectacle qui remonte le fil de l’humanité, entre science, poésie et humour
Avec "HUMAINS", l’artiste suisse NARCISSE interroge notre espèce, notre capacité à apprendre, à rêver, à transmettre. Entre poésie, technologie et engagement, il nous invite à regarder autrement ce que signifie être humain aujourd’hui. Une rencontre avec un artiste qui croit encore – et fermement – au pouvoir des mots, de l’art et de l’éducation pour éclairer notre époque. Le spectacle sera présenté au Théâtre Monnot, du 28 mai au 1er juin 2025 à 20h30.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de questionner notre intelligence en tant qu’espèce dans le spectacle "HUMAINS" ?
Questionner notre intelligence, tout est parti de ça, justement: j’ai lu que selon certaines études, le chimpanzé serait plus intelligent que nous. Alors je me suis demandé pourquoi nous sommes la seule espèce animale qui a marché sur la lune, qui a peint la Joconde, qui utilise des téléphones intelligents. Ce qui a fait la différence, c’est notre incroyable capacité à apprendre des autres et à accumuler des connaissances. Et quand on y réfléchit, ça semble évident: seul sur une île déserte, personne au monde n’est capable de fabriquer un téléphone portable. Cet appareil est l’aboutissement de milliers d’années de mise en commun de petites inventions, d’idées nouvelles, de petites découvertes. Et ce n’est qu’un exemple parmi des milliers d’autres. C'est l’ensemble de nous tous et toutes qui fait l'humanité, pas quelques individus isolés que les médias mettent en avant. Et c’est cette histoire de l’humain que j’avais envie de raconter.
Vous mêlez poésie, musique et technologies comme les hologrammes : comment gardez-vous l’émotion au cœur de tout cela ?
Nous sommes d’accord, j’imagine, que la musique et la poésie sont de formidables machines à émotions. J’essaie d’utiliser la technologie dans cet esprit-là également. D’une part, dans mes spectacles, la technologie est toujours au service du propos, elle accompagne mon texte, elle l’illustre, le complète. C’est le texte et la musique qui dictent ce que je montrerai dans mes hologrammes, jamais le contraire. D’autre part, j’aime beaucoup utiliser la technologie pour son côté merveilleux, magique. Il y a un côté un peu cirque, un peu de prestidigitateur. Je suis tout content quand des gens me disent qu’ils ont cru durant un moment que les personnages en hologrammes étaient vraiment sur scène, ou quand ils me demandent comment je fais pour faire apparaître des lettres et des mots devant moi. J’essaie de susciter l’émerveillement de l’enfant qui sommeille en nous. Et en cela, je trouve que la technologie peut être très poétique, émouvante. Finalement, elle n’est qu’un outil. C’est nous qui décidons d’en faire des machines à laver… ou des machines à faire rêver.
Après plus de 1000 ateliers avec des jeunes, qu’est-ce que leur vision du monde vous apprend sur notre époque ?
Elle me donne de l'espoir. Parce que je fais écrire de la poésie aux élèves, et dans leur très grande majorité, ils montrent des préoccupations humanistes: ils parlent de tolérance, d’acceptation de l’autre et de ses différences, de pacifisme, de respect de la planète. Les jeunes sont dépités du monde qu’on leur laisse, les guerres, le pillage des ressources naturelles, la disparité des richesses, les discriminations… et j’espère qu’ils seront capables de créer un monde meilleur – du moins, ils en ont l’intention. Alors bien sûr, la majorité des jeunes que je rencontre vivent en Suisse ou en France: ils sont privilégiés, mais je suis intervenu aussi au Mali, au Burkina Faso, à Madagascar, à Chypre, entre autres, et j’ai retrouvé ces mêmes valeurs. Il faut dire qu’au travers de la poésie, j’essaie de leur montrer que le monde est complexe, pluriel – parce qu’un texte poétique peut se comprendre de différentes manières, il pose plus de questions qu’il ne donne de réponses, il n’est pas dans le registre du concret, du « c’est comme ça et pas autrement ». Et cela leur fait du bien de se rendre compte qu’il y a d’autres manières de penser du monde que les discours du président des Etats-Unis.
Et puisque la force de l’humanité, c’est sa capacité à apprendre des autres, je trouve que les jeunes sont assez formidables dans ce domaine quand ils partagent leurs compétences sur les réseaux sociaux: on trouve sur YouTube des milliers de vidéos qui donnent des conseils de cuisine, de maquillage, de mécanique; des cours de langues, de physique, de musique… c’est d'une richesse infinie.
Je ne prétends pas pour autant que tout va bien. Certains jeunes ont des idées préconçues, une certaine étroitesse d’esprit. Mais on sous-estime leur capacité à apprendre, et donc à changer d’avis. Je n’aime pas trop cette façon de culpabiliser les jeunes en disant : « vous êtes un homme, donc vous êtes misogyne », « vous êtes Français, alors vous êtes colonialiste », « vous êtes blanc, vous êtes raciste ». J'ai envie de répondre: eh bien, apprenons à changer. En cela, j’accorde beaucoup d’importance à l’éducation – c’est la principale raison pour laquelle j’anime des ateliers en parallèle à mes spectacles.
Vous liez slam et réflexion philosophique. C’est une manière pour vous de redonner au langage sa force d’éveil ?
Oui clairement. J’ai la chance de pouvoir prendre la parole face à beaucoup de gens, et je ne veux pas la gâcher. J’ai espoir que quelques personnes sortent de mon spectacle en se disant « à partir de maintenant, je vais penser un peu différemment ». Je ne voudrais surtout pas être un donneur de leçons: je n’attends pas à ce que le public pense comme moi; au contraire, je donne des pistes pour que chacun chacune puisse imaginer un monde différent à sa manière. Avec le spectacle HUMAINS, je cherche à nous réconcilier - un peu - avec notre espèce, à nous rendre compte que l’humanité est capable de faire des choses magnifiques, et que nous sommes tous et toutes une part de cette humanité. L’humanité est entre nos mains.
Pensez-vous que l’art peut encore éveiller ou transformer dans un monde saturé de messages et de doutes ?
Je dirais même que ça devrait être la mission fondamentale de l'art. Avec les réseaux sociaux, les télévisions, les médias, nous sommes saturés d’informations, certes, mais très majoritairement d’informations factuelles, qui nous disent que le monde est tel qu’il est et qu’il est toujours le même. La télévision nous assomme de télé-réalité: elle nous montre la vie très ordinaire de gens très ordinaires. Nous vivons dans un monde qui imagine à notre place. Parce que si je suis admiratif du partage des connaissances que permettent les réseaux sociaux, je suis aussi très perplexe quand je vois des jeunes regarder des vidéos où l'on voit des gens jouer à des jeux vidéo, ou quand ils demandent à Chat GPT de composer une chanson ou de peindre un tableau. Qu’est-ce qu’ils font du temps gagné pendant que l’intelligence artificielle imagine à leur place ? Le ménage ?
Les artistes sont là justement pour nous rendre notre imagination – pour nous éveiller, c’est le mot juste. Ils sont là pour nous rappeler qu’il existe un monde au-delà du concret, du réel, du vendable. Alors bien entendu, il y a aussi des artistes qui font du pur divertissement, sans aucune idéologie, sans même un message, et je ne dénigre pas leur travail, nous avons besoin aussi de simplement passer du bon temps. Mais ce n’est pas ce que je cherche à faire. Enfin, j’espère bien que les gens qui viennent me voir passent aussi du bon temps, mais pas que ça.
De et avec NARCISSE
Musicien : Gaëtan Lab
Metteur en scène : Jean-Philippe Daguerre, Molière 2025 meilleur metteur en scène
BILLETS ANTOINE ou 70626200
Et les artistes suivants qui apparaissent en hologrammes :
Camille et Julie Berthollet (violonistes), Phanee de Pool (chanteuse), le duo Aliose (chanteur et chanteuse), Pascal Rinaldi (chanteur), Jocelyne
Rudasigwa (contrebassiste), le choeur Saint-Michel (direction Philippe Savoy), Vincent Zanetti (percussionniste), Marc-Olivier Savoy (batteur), Louise Knobil (bassiste), Francesco Biamonte (chanteur lyrique), Svenn Moretti-Golay (chanteur lyrique/drag queen), Damien Durand (danseur performeur), Hélène Ramer (artiste de cirque), Marc Mydras (artiste de cirque), Silmo (danseur), Jade Albasini (danseuse), Swathi Sasikumar (danseuse), Global Bob (danseur), Manon Leresche (danseuse).
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