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Écrire, pourquoi ?

04/05/2025|Ramzi Salman

Écrire, pourquoi ?

D’abord je le fais pour mes petits-enfants, car j’aurais souhaité moi-même mieux connaître mon grand-père au lieu de l'avoir connu simplement comme l'homme qui m'ouvrait son armoire pour m'offrir des chocolats, en guise d'amour.

On me racontait que lorsqu’il perdit son père, il était jeune et devint très tôt, l'unique pourvoyeur de sa famille.

On me racontait que c'était un an avant qu’il n’obtienne son diplôme d’université et que son père, mon arrière-grand-père, qui faisait partie de la première promotion de médecins de l’Université Américaine était parti en campagne en Syrie avec l’armée britannique, et qu'il y attrapa le typhus et mourut là-bas.

On me racontait aussi que l'Université Américaine avait permis alors à mon grand-père de sauter ses examens pour aller retrouver son père en Syrie, avant qu’il ne succombe, en l'épargnant de ses examens. Il effectua ainsi un pénible voyage pour devenir le dernier de sa famille à voir son père sur son lit de mort.

On me disait aussi qu'il travailla dans le commerce des grains et posséda une ferme au Sud, puis devint par la suite directeur de l'hôpital de l'Université Américaine.

Et dans son salon était accroché le portrait encadré d’un cheval.

Je savais ainsi qu'il aimait les chevaux car ma mère me disait que ce portrait était celui de “Ghazélé”, son cheval adoré.

En dépit du peu que j’ai connu de lui, sa vie m'appris que l'homme pouvait être important en restant humble.

Je le voyais partager un taxi-service avec d’autres passagers, pour aller à la plage avec une serviette enroulée sous le bras.

J’aurais aimé connaître mon grand-père de plus près, et c’est pour cela que j’écris pour mes petits-enfants.

Le passé est une destination fascinante à visiter.

Explorer la vie de nos ancêtres, tenter de parcourir l’histoire à reculons.

Car les lieux dans lesquels nous vivons aujourd'hui étaient occupés hier par ces acteurs dont nous sommes issus.

En écrivant je raconte en quelque sorte à mes petits-enfants, la pièce de théâtre de ma vie lorsque eux ne s’y trouvaient pas.

Et mon présent sera leur passé.

Je leur jette ainsi une fleur de l’autre rive du fleuve de la vie, qui leur parlera des sources de leur propre chemin.

Mais il y existe aussi d’autres raisons pour écrire.

Les gens du troisième âge, dont je fais maintenant partie, cherchent souvent un défoulement à travers lequel ils pourront s’exprimer à ce stade plus mûr de leur vie.

Certains découvrent la peinture ou la céramique, moi j'ai atterri sur l’écriture.

À une époque où les informations nous pleuvent sur la tête, nous aimons reprendre notre souffle et nous arrêter sur les petites choses simples qui parfument la vie.

Et l’écriture nous permet à tout moment de voyager en dehors du quotidien.

L'écriture c'est l'artisanat de l'esprit.

C'est la sculpture qui sort d’un vulgaire bloc de pierre.

Nos pensées sont des fils enchevêtrés dans la tête que l'on peut, en écrivant, dégager l'un de l'autre.

Et c'est si agréable lorsque l’on en extrait un, et que l’on se met à le dérouler avec soin.

À chacune de ces extractions, on se sent mieux vivre.

C'est comme si faisait le ménage de nos pensées avant de vaquer à nos occupations mondaines.

Écrire finalement est une très belle façon de tuer le temps.

Avant que le temps ne prenne fin ...

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