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Corps en fugues, âme en pierre, la conférence en mouvement de l’Odyssée musicale

MUSIQUE

18/09/2025|Nora Lebbos

Après « Le rêve de Calypsô » en août, le club social Bacchus fondé par Chloé Fakhouri Kazan a proposé le 8 septembre dernier dans le cadre de son festival « l’Odyssée musicale » une conférence chorégraphique en musique inspirée des Métamorphoses d’Ovide. Conférence accueillie et soutenue par Elias Fakhouri dans sa demeure de Zahlé.  

 

 

Plus besoin de présenter « l’Odyssée Musicale », festival qui s’insère de plus en plus dans le paysage Libanais en proposant des expériences riches et originales. Début septembre, le club social Bacchus imagine et crée une conférence inédite autour de cinq mythes des Métamorphoses d’Ovide, accompagnée de la danse de Serge et Nay Mouawad et la flûte à bec de Farid Rahmé. Cet événement inédit a été soutenu et accueilli dans la maison d’Elias Fakouri.

 

Rencontre avec Chloé Fakhouri Kazan, à l’origine de l’événement.


Chloé Fakhouri Kazan, crédit photo Mohsain Hammoud


Pouvez-vous nous présenter l’événement?

J’ai préparé pendant quatre à cinq mois cet événement. Je voulais faire une conférence inédite, vivante, avec de la musique, de la danse, des poèmes. Un autre genre de conférence avec une proposition variée qui engage le public.  

J’ai choisi cinq mythes des Métamorphoses d’Ovide qui traitent de cinq métamorphoses en y ajoutant des poèmes inspirés de ces mythes. L’ensemble était accompagné de la flûte et de la danse avec un programme de musique classique dont certaines oeuvres étaient directement inspirées de mythes, tel Syrinx de Claude Débussy ou Daphné de Jacob van Eyck.


Pourquoi “corps en fugue, âme en pierre” ?

Le titre donne des nuances à la mythologie d’Ovide. Le corps en fugue évoque le mouvement, la fuite, la liberté aussi bien que les variations musicales, car dans le livre d’Ovide ce sont des créatures qui changent de forme.

L’âme en pierre suggère une intériorité figée parfois blessée, elle évoque la fixité des sentiments car le livre d’Ovide parle certes de language mythologique mais évoque nos émotions tels l’amour, la peur, la jalouise. Ces émotions sont universelles et ancrées, elles ne bougent pas.


Serge et Nay Mouawad, crédit photo Mohsain Hammoud


Pourquoi avez-vous choisi l’oeuvre d’Ovide?

Les Métamorphoses ont inspiré nombre d’artistes, c’est un livre avec une grande force. Je l’ai choisi car il représente l’histoire de tout le monde. Chacun de nous, à la suite de difficultés, se métamorphose à l’intérieur.

Lorsque j'étais au Liban durant le COVID, j'ai vu autour de moi des jeunes personnes changer complètement, passer de personnes joyeuses à désespérées. Cela m’a beaucoup attristée. Cette conférence est inspirée de ces personnes qui se sont métamorphosées à l’intérieur et qui ne reviennent plus comme avant. J’ai écrit un poème sur ça que j’ai lu pour l’ouverture de la conférence.

Aussi, je suis une amoureuse de la mythologie. Les mythes ont commencé au départ par la tradition orale, chacun y ajoutant sa touche personnelle. Ce sont les fondements de nos sociétés, de nos croyances. Les mythes sont vivants.

 

Pourquoi le choix de la flûte à bec et de la danse?

La flûte est souvent associée aux métamorphoses et mythes. Par exemple pour échapper au dieu Pan, la nymphe Syrinx se transforme en roseau. Pan coupe les roseaux et fabrique la flûte de Pan. La flûte naît ainsi directement d’une métamorphose; le souffle de Pan traverse la matière et transforme l’Amour en musique. On peut très bien imaginer cet instrument dans la nature accompagner toutes ces nymphes et ces Dieux.

Outre les morceaux classiques du programme, Farid Rahmé m’accompagnait lorsque je récitais les poèmes avec des improvisations à la flûte exprimant les oiseaux, l’air, la nature comme si l’instrument était dans le mythe.

Pour la danse, j’ai imaginé les danseurs habillés de telle sorte qu’ils faisaient partie du mythe. Serge Mouawad a un physique mythologique, sculptural, on dirait qu’il sort de ce livre et incarne une créature mythologique, Nay Mouawad et lui-même sculptaient l’espace quand ils dansaient et donnaient vie aux mythes.


Farid Rahmé, crédit photo Mohsain Hammoud


Serge et Nay Mouawad, crédit photo Mohsain Hammoud


Quel est le message que vous souhaitiez transmettre à travers la conférence?

À l’instar de l’homme qui marche, la sculpture de Rodin, qui n’a ni tête, ni bras mais continue à marcher, je souhaitais proposer au public à travers cette conférence musicale, le message de l’évolution après chaque expérience vécue.

Notre vie est parsemée de changements, les Libanais depuis six ans vivent des situations difficiles, ils se métamorphosent et chacun perd une version de soi. Mais nous n’avons pas besoin d’être parfaits pour avancer (cf la statue sans tête de Rodin) la vie nous façonne et les situations difficiles nous poussent à changer de perspective et à évoluer.


Y a-t-il un mythe que vous aimeriez mettre en avant?

Le mythe de Pan et Syrinx montre qu’à partir d’une situation difficile le résultat peut être positif, car l’Amour se transforme en musique, c’est le corps qui se réinvente.

Pan fabrique sa flûte à travers un corps métamorphosé, la musique naît d’une transformation, elle sublime cette perte et l’Art apparaît alors comme une mémoire du corps disparu de la nymphe Syrinx.


Serge Mouawad, crédit photo Mohsain Hammoud


Vous avez été accueilli pour cette conférence dans la maison privée d’Elias Fakhouri, pourquoi le choix d’une maison privée ?

Le club social Bacchus montre qu’il est fidèle à son idée première: on avait commencé dans les maisons après l’explosion à Beyrouth. Même si nous proposons des lieux insolites comme des musées ou bibliothèques, notre idée première est de convertir les maisons et donner accès à la culture chez les habitants. Cela crée une métamorphose de l’espace en lieu de concert, salle de danse et conférence.

J’aimerais que toutes les maisons au Liban deviennent des lieux de culture, de musique savante, des lieux où on échange à partir d’une idée noble. C’est quelque chose qui me tient à coeur. Tous les ans j’essaie de faire un concert dans une maison.

 

Le prochain événement du festival l’Odyssée musicale « Le soupir du Tango » aura lieu le mardi 23 septembre à 19h à la municipalité de Zouk Mikael, pour réservations : 76 668 790.

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