Vous poussez la porte du 5 rue de Fribourg et en un clin d’œil vous êtes au pays des mille et une nuits. Des senteurs d’encens vous enveloppent l’âme et le cœur et vos yeux sont immédiatement pris en otage par sculptures et calligraphies, peinture et livres qui ont bercé votre adolescence. Entre ces murs, les cultures levantines et méditerranéennes côtoient l’occident et la langue arabe qui a su si joliment vous apprivoiser en philosophie et poésie est reine .
Le génie du lieu est un personnage qui vous reçoit avec bonhomie et sourires et que vous découvrez en éclats de rires.
Notre première rencontre avait eu lieu en plein mois de décembre et en plein confinement. Je faisais alors la connaissance de ce baroudeur de la culture passionné d’art, de livres, de musique et de gastronomie. En metteur en scène éclairé il avait orchestré une interview toute en saveurs autour de la gastronomie culture.
Son histoire à lui est déjà un scénario hors du commun. Arrivé du Soudan à l’âge de sept ans il vit depuis plus d’un demi-siècle au bord du lac Leman.
Envoyé avec ses frères et sœurs pour être scolarisé pensionnaire dans un établissement privé ils sont tous éparpillés au gré des disponibilités entre Genève et Fribourg mais la joyeuse tribu se retrouve chaque année au pays pour les vacances et reprend ses traditions familiales. Comme il le raconte avec bonhomie Alain Bittar est Soudanais blanc, chrétien arabe … pas évident pour comprendre une identité et s’enraciner. Il épouse toutes les causes et milite activement contre toutes les formes d’injustice, se revendique de gauche et pro palestinien mais resté totalement ouvert à tous les dialogues et toutes les cultures. Déclaré enfin citoyen suisse il y a deux ans c’est en larmes qu’il reçoit la médaille du mérite de la ville de Genève très haute distinction culturelle en reconnaissance à tous ses efforts.
Nous discutons autour d’un copieux buffet élaboré par ses soins. Celui qui n’a jamais oublié les recettes d’où il vient vous reçoit toujours avec générosité et raffinement.
Alain pouvez-vous nous raconter votre histoire avec ce lieu de vie qu’est l’ICAM -l’olivier ?
La librairie arabe l'Olivier a été créée en 1979. En 2014 sous la pression grandissante d'internet, la librairie s'est trouvée en difficulté financière comme beaucoup d’autres librairies vouées à la culture arabe (la librairie Avicennes à Paris, la librairie El Saqi à Londres avaient déjà fermé leurs portes). Nous avons alors avec l'ancien maire de Genève, créé une association à but non lucratif d'utilité publique (L'ICAM - Institut des cultures arabes et méditerranéennes) qui a repris le flambeau en bénéficiant de subventions et de dons. L'actuel président de l'Association est François Barras, diplomate ancien ambassadeur à Beyrouth.
Je suis le directeur et Maude Bittar ma fille l'administratrice.
Le travail que vous faites est absolument remarquable réunissant littérature expositions de peinture, musique arabe traditionnelle, musiciens… et vous trouvez en plus le temps de cuisiner !
Lorsque j’ai annoncé à mon père que j’allais ouvrir une librairie lui qui m’avait envoyé très tôt à Genève dans l’espoir de me voir devenir banquier ou au moins économiste il était médusé !
Je voulais être à la hauteur de ses espérances en plaçant la barre très haut pour tout ce que j’entreprends ici, l’épater par les livres et la cuisine est pour moi un moyen de retrouver la maison de mon enfance et la lumière unique de cet Orient que je porte partout dans mon cœur.
Alors justement, quel est votre plat préféré celui qui vous rattache à la maison de votre enfance ?
La molokheya à la façon égyptienne (qui était le repas du dimanche de ma petite enfance avec poulet, échalotes et vinaigre) et la kebbé nayé comme la faisait ma maman, avec un petit peu plus de bourgoul.
Ce génie pétri d’humour saura vous prendre par le bout du cœur avec dans sa lampe et ses valises de quoi vous faire voyager dans les recoins de la culture arabe voguant en poésie entre Adonis et Nizar Kabbani.
Amoureux des mots, amoureux de la vie il vous conseillera mille lectures avec un cœur et un sourire d’enfant et vous ne pourrez qu’obtempérer avec une seule envie : revenir vous installer sous les branches de cet Olivier bienveillant et fédérateur.
Librairie ICAM - l’olivier
Rue de Fribourg 5,
1201 Genève
+41 22 731 84 40
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