La culture, clé de la renaissance libanaise et ciment de l’unité nationale
24/01/2025|Joumana Chahal Timery
Dans un pays comme le Liban, où les racines profondes de l’histoire et les éclats de la culture s’entrelacent avec l’identité nationale et le sentiment d’appartenance, la Culture prend une dimension capitale. Elle est ce qui transcende les appartenances confessionnelles et politiques, ce qui nous rappelle que nous partageons une histoire commune, un héritage collectif. La culture, loin d’être un simple luxe ou une distraction intellectuelle, est le fil conducteur qui relie les Libanais à leur passé glorieux et à leur riche héritage. Elle incarne l’âme de la nation et porte les aspirations de son avenir.
L’histoire libanaise nous enseigne que notre culture a toujours été une force de résistance. Pendant la guerre civile, alors que tout semblait s’effondrer, c’est la poésie de Nadia Tuéni, les chansons de Fairouz et les œuvres d’Etel Adnan qui ont maintenu l’espoir vivant. Pendant les crises successives, c’est dans l’art, la littérature et les traditions que les Libanais ont trouvé un refuge et une raison de croire en demain.
Le Liban a donné naissance à des figures intemporelles telles que Gibran Khalil Gibran et Mikhaïl Neaïmy, dont les œuvres continuent de résonner bien au-delà des frontières. Ces géants de la pensée témoignent du rôle unique et rayonnant du Liban dans le monde arabe en tant que carrefour de créajtivité, de réflexion et d’innovation.
Nelson Mandela affirmait : « L’éducation et la culture sont les armes les plus puissantes pour changer le monde. » Au Liban, ces armes sont aussi des boucliers. Elles nous protègent de la marginalisation, du désespoir et de la perte de sens. En investissant dans la culture, nous investissons dans un Liban plus fort, plus uni et plus rayonnant sur la scène mondiale.
Mais la culture ne peut survivre seule. Elle a besoin de vision, de leadership et de soutien. Le Ministère de la Culture doit devenir une institution pionnière, inspirée par les grandes figures de notre patrimoine. Comme l’écrivait Gibran : « Vous êtes les arcs à travers lesquels vos enfants, comme des flèches vivantes, sont projetés. » Ce ministère doit être cet arc qui projette la culture libanaise dans l’avenir, tout en restant enraciné dans le passé.
Préserver la culture libanaise ne signifie pas s’enfermer dans le passé, mais faire de ce passé une passerelle vers l’avenir. Nos vieux quartiers ne doivent pas devenir des ruines silencieuses, mais des lieux vivants où les jeunes générations apprennent à aimer leur histoire. Nos traditions ne doivent pas être des reliques poussiéreuses, mais des sources d’inspiration pour la créativité contemporaine.
Pourtant, aujourd’hui, ce patrimoine culturel est menacé : monuments historiques, bâtiments ancestraux et traditions artistiques sont en péril, victimes de la négligence, de l’érosion des valeurs et d’un système gangrené par la corruption.
Face à cette réalité, il est impératif que le Ministère de la Culture soit perçu comme bien plus qu’une simple institution administrative. Il doit devenir le gardien de notre mémoire collective, le protecteur des trésors du passé, et un catalyseur pour les talents de demain. Le choix du leader à la tête de ce ministère est crucial : il faut un visionnaire capable de transcender les limites des moyens disponibles et de transformer la culture en un véritable moteur de renaissance nationale.
L’histoire nous offre des exemples inspirants, comme celui de la France avec André Malraux, ministre de la Culture, qui a su préserver le patrimoine français malgré des ressources limitées. Sa conviction que « la culture donne un sens à la vie » a guidé des projets ambitieux, tels que la restauration des monuments historiques et l’accès à l’art pour tous. De même, Jacques Lang, autre figure emblématique, a redéfini le rôle de la culture en la plaçant au centre du développement économique, social et identitaire. Ces modèles montrent que la culture, lorsqu’elle est soutenue par une vision et une volonté, claires, peut transformer les nations.
Aujourd’hui, un souffle d’espoir traverse le Liban avec l’arrivée d’une nouvelle gouvernance. Ce moment charnière offre une opportunité précieuse : celle de redonner à la culture la place qui lui revient en tant que pierre angulaire de la reconstruction nationale.
Alors, pour réussir, il est impératif d’avoir des dirigeants visionnaires, capables de dépasser les limites actuelles et de comprendre que la construction d’une véritable nation ne peut se faire sans une valorisation profonde de la culture et du patrimoine. C’est par eux que l’on peut redéfinir une identité libanaise commune, unissant tous les Libanais et ouvrant la voie à une réconciliation nationale à travers l’élaboration d’un nouveau contrat social.
Avec une conviction sincère et un espoir renouvelé.
Joumana Chahal Timery
Docteure en Littérature
Chercheur dans la poésie lyrique et le patrimoine
Présidente de l’association Patrimoine Tripoli Liban
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